Avec des progrès qui stagnent, il est temps d'agir sérieusement en faveur de l'éducation pour tous
De nouvelles données publiés par l'Institut de statistique de l'UNESCO révèlent qu'il n'y a pas eu de progrès dans la réduction du nombr d'enfants, d'adolescents et de jeunes non scolarisés au cours de la dernière décennie, au niveau mondial. Ces chiffres appellent à un investissement beaucoup plus important dans l'éducation à tous les niveaux pour assurer que des progrès soient réalisés en vue d'atteindre l'ODD 4. Cela suppose notamment davantage de ressources pour la collecte et l'analyse des données.
02 mars 2018 par Silvia Montoya, UNESCO Institute for Statistics, et Karen Mundy, UNESCO Institute of Educational Planning
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Une famille dans le Comté de Montserrado au Libéria. Crédit : GPE/Kelley Lynch
Une famille dans le Comté de Montserrado au Libéria.

Les derniers chiffres concernant le nombre d’enfants non scolarisés sont pour le moins édifiants. Selon de nouvelles données de l’Institut de Statistique de l’UNESCO (ISU), les progrès stagnent toujours. Dans le monde, il reste ainsi encore près de 263 millions d’enfants, d’adolescents ou de jeunes non scolarisés, soit un sur cinq, et ce chiffre n’a pratiquement pas bougé au cours des cinq dernières années.

Malgré des efforts laborieux pour scolariser chaque enfant en primaire, peu ou aucune avancée n'a été réalisée au niveau mondial ou cours de la décennie passée, et 9 % des enfants en âge de fréquenter le cycle primaire étaient privés de leur droit à l’éducation en 2008.

Les nouvelles données de l’ISU montrent que les progrès stagnent

Ces derniers constats font partie d'une importante publication de l’ISU sur les données de l’éducation et les indicateurs liés à l’Objectif de développement durable 4 (ODD 4), prévue pour informer la quatrième Réunion du Comité directeur, ODD-Éducation 2030, qui débute aujourd’hui à Paris. Les décideurs y discuteront en effet des stratégies et avancées vers la réalisation de l'objectif. Compte tenu de l’engagement ambitieux que constitue offrir un enseignement primaire et secondaire de qualité à chaque fille et garçon d’ici 2030, le monde ne peut simplement plus se permettre de stagner davantage en matière de progrès.

Le propos n’est pas ici d’atténuer l’importance des progrès déjà accomplis par de nombreux pays au fil des ans pour éliminer des obstacles à l'éducation tels que les frais de scolarité, le manque de bâtiments scolaires, d'enseignants, etc. Ceux-ci ont permis à des millions d’enfants qui jadis avaient peu de chance, voire aucune de bénéficier d'une éducation, d’être à présent en classe.

Néanmoins, 63 millions d’enfants en âge de fréquenter le primaire (entre 6 et 11 ans) demeurent non scolarisés, et à ce nombre s'ajoutent les 61 millions d'adolescents en âge d’être scolarisés dans le premier cycle du secondaire (entre 12 et 14 ans) et les 139 millions de jeunes supplémentaires en âge de fréquenter le deuxième cycle du secondaire (soit un jeune sur trois âgé de 15 à 17 ans). Ces jeunes risquent quatre fois plus de ne pas avoir été scolarisés dans le primaire et plus de deux fois plus de ne pas avoir été scolarisés dans le premier cycle du secondaire.

Ceci représente un énorme gâchis du potentiel de jeunes talents productifs, créatifs et dynamiques, nécessaires en tant que moteurs du développement durable pour les prochaines décennies.

L’Afrique subsaharienne affiche les chiffres les plus élevés en matière d'enfants et de jeunes non scolarisés

Les chiffres de l’ISU confirment que certaines régions sont à la traîne. Comme les années précédentes, l’Afrique subsaharienne demeure la région comportant les taux de non scolarisation les plus élevés tous groupes d’âge confondus et compte plus de la moitié (34 millions) des 63 millions d’enfants en âge de fréquenter le primaire et non scolarisés. L’Asie du Sud affiche le deuxième chiffre le plus élevé en matière d’enfants non scolarisés, soit 10 millions.

Les filles continuent d’être confrontées à de véritables obstacles à l’éducation dans la plupart des régions. En Afrique subsaharienne, les filles de tous les groupes d’âge risquent davantage que les garçons d’être exclues de l’éducation. Pour cent garçons en âge de fréquenter le primaire et non scolarisés, 123 filles se voient privées de leur droit à l'éducation.

La bonne nouvelle est que les données suggèrent que les filles ayant la possibilité de commencer l'école ont tendance à poursuivre leurs études. Dans l’ensemble de l’Afrique subsaharienne, l'indice de parité entre les sexes ajusté diminue légèrement de 1.23 pour le groupe en âge d’être scolarisé dans le primaire à 1.11 pour les populations en âge de fréquenter les deux cycles du secondaire.

Les enfants des pays en développement sont les plus mal lotis

Il existe d'énormes disparités entre les taux de non scolarisation des pays les plus riches et ceux des pays les plus pauvres. Ces disparités sont flagrantes au niveau du cycle primaire, l'enseignement primaire étant la norme dans l'ensemble des pays à revenu élevé, tandis que 20 % des enfants dans ce groupe d'âge se voient privés de leur droit à l'éducation dans l'ensemble des pays à faible revenu.

L’écart se creuse avec l’âge : 59 % des jeunes en âge de fréquenter le deuxième cycle du secondaire sont non scolarisés dans les pays à faible revenu, contre 6 % des jeunes dans les pays à revenu élevé. Il est déjà terrible qu'un enfant, adolescent ou jeune sur cinq soit non scolarisé dans le monde, mais dans les pays à faible revenu, ce chiffre passe d’un à trois.

C’est le résultat de l’association néfaste d’un manque continu d'accès à l'éducation pour certains enfants (souvent les plus défavorisés) et d'une crise de l'apprentissage, avec un nombre trop élevé des enfants qui sont scolarisés, mais n’acquièrent pour autant pas les compétences minimales en lecture ou en mathématiques. Selon les données de l’ISU, un enfant et adolescent sur six n’atteint pas le niveau de compétence minimal en lecture ou en mathématiques – même si la plupart d’entre eux sont scolarisés.

Les enfants qui vont à l’école doivent apprendre davantage

Il est clairement nécessaire de veiller à ce que l’éducation soit de qualité pour chaque enfant. Pour cela, des approches complètes sont nécessaires afin de toucher ceux qui sont privés d'éducation du fait de qui ils sont et où ils sont, et de veiller à ce qu’ils apprennent ce qu’ils ont besoin de savoir une fois qu’ils sont en classe.

Ce type d’approches se base sur des données de qualité. Les indicateurs et méthodologies développées par l’ISU et l’Alliance mondiale pour la mesure de l’apprentissage (GAML) gagnent de l'attrait et ont été approuvées lors de la réunion en janvier du Groupe technique de coopération (GTC) sur les indicateurs de l’ODD 4 Éducation 2030, et certains pays commencent à communiquer un ensemble total de 33 indicateurs thématiques et mondiaux en 2018.

Le GPE complètera le GAML et les objectifs élargis du renforcement des systèmes de données nationaux grâce à son Fonds en faveur de l’échange de connaissances et de solutions innovantes (KIX), approuvé par le Conseil d'administration du GPE en décembre 2017. Le GPE fera ainsi des investissements dans les biens mondiaux liés aux domaines des systèmes d’évaluation des apprentissages et d'amélioration de la qualité des données, au moyen d’un appel d’offres concurrentielles. L’objectif spécifique de ce fonds est de veiller à ce que des acteurs mondiaux et régionaux soient en place pour collaborer avec les pays à de meilleures pratiques en matière de données. Par ailleurs, le GPE œuvre aux côtés de l’UNESCO pour organiser une réunion des pays en développement et des partenaires multilatéraux intéressés par les défis du SIGE en avril 2018.

Collecter des données sur les jeunes qui n'ont pas bénéficié d'éducation

L’ISU développe également de nouveaux indicateurs sur les populations en âge de fréquenter le deuxième cycle du secondaire les plus susceptibles d’être non scolarisées, qui s’ajoutent si souvent à celles qui sont sans emploi, éducation ou formation (NEET). L’ISU étudie les différents éclairages que pourraient fournir des données ventilées sur les NEET en ce qui concerne par exemple le niveau d’études atteint, l’acquisition des compétences de base et la préparation à l'entrée sur le marché du travail. Dans un autre domaine important, l’ISU s’efforce d’élargir les données sur les enfants handicapés, avec le soutien du GPE.

La question est de savoir si les pays ont les capacités de fournir et communiquer les données dont nous avons besoin pour atteindre l’objectif mondial en matière d’éducation. Les ressources sont nécessaires et urgentes. La récente Conférence de financement du GPE de Dakar, au Sénégal, a vu les premiers pays en développement prendre des engagements financiers pour l'éducation. La tâche est à présent de mobiliser ces investissements par la production et l'exploitation de bonnes données, en s’appuyant sur le plaidoyer pour l’investissement de l’ODD 4, qui confirme la valeur d’une canalisation des ressources vers les systèmes de données. Le nouveau Fonds du GPE pour le KIX fournira des opportunités de renforcement afin de garantir la mise en place de systèmes de données plus solides dans les contextes de faible revenu et de fragilité.

Les nouveaux chiffres sur les enfants non scolarisés nécessitent un investissement mondial accru en matière d'éducation à tous les niveaux pour garantir les avancées sur la voie de l'ODD 4, notamment davantage de ressources pour la collecte et l'analyse des données permettant de suivre le rythme et l'équité des progrès.

Comme l’a si bien dit Gayle Smith, PDG de ONE Campaign à Dakar : « Il nous faut faire correspondre à l’investissement politique et verbal un investissement financier. Faites une pause dans l'action que vous entreprenez pour éteindre les feux d'aujourd'hui et employez-vous à empêcher ceux de demain. »

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Commentaires

Malgré quelques notables dans l'accès à l'éducation, la qualité de l'apprentissage reste un défis. Les obstacles restent nombreux. La qualité de l'éducation et l'apprentissage tout au long de la vie, inscrite en lettre d'or dans l'agenda 2030 reste confronté à plusieurs maux.
- L'augmentation de la population.
- la pauvreté des ménages et des familles
- L'incohérence entre les politiques éducatives, les programmes d'orientation et les lois sur l'éducation
- Le faible ancrage de l'éducation à l'environnement et au développement durable,malgré l'entrée en vigueur de l'approche par compétences, en cours de vulgarisation, et confronté à la dure réalité de l'operationnalisation
- la problématique de la formation initiale et continue des enseignants, incapable d'intégrer l'APC dans les nouveaux curriculas
- l'absence d'une vision prospective et de gouvernance scolaire,
- La faible intégration des TICE, des e-learning, dans le processus apprentissage- enseignement -évaluation
- La faible intégration des apprentissages participative et inclusive
- Le peu d'intérêt accordé à l'innovation pédagogique
Etc

LE FAIBLE TAUX DE SCOLARISATION DES ENFANTS S EXPLIQUENT AUSSI PAR LA PAUVRETE EXTREME DES PARENTS,EN AFRIQUE LA PLUPART SONT DES CULTIVATEURS.LES CULTUVATEURS AFRICAINS SONT ACCABLES PAR DE NOMBREUX PROBLEMES.CE FAIBLE DE SCOLARISATION PEUT ETRE EXPLIQUE PAR LES CONFLITS..........

Évitons de banaliser les choses. L'agriculture est la première source de richesse des pays africains. Nos pays africains sont essentiellement agricoles. Au l'aune de l'économie du marché, l'agriculture doit impérativement s'adapter à la mondialisation. Nos produits ne s'adaptent pas à la concurrence imposée par les multinationales. Les supermarchés vendent très peu les produits alimentaires d'origine africaine. En zone rurale, il y'a très peu d'offres éducatives de qualité, les cultivateurs qui appartiennent à des ménages pauvres n'ont pas les moyens de subvenir aux besoins scolaires de leur progéniture. Pour la majorité d'entre eux, il est difficile d'assurer la scolarité de la maternelle à l'Université et sans assurance de trouver le travail au terme des études supérieures hors de leur portée. . Les impôts qui sont prélevés du Commene intterieur et extérieur doivent aider à financer l'accès des élèves pauvres à l'éducation. Il est impératif de mobiliser le financement participatif pour promouvoir l'éducation inclusive. Les modes de production et de consommation durables exigent que les entreprises participent au financement de l'éducation par l'approche de la Responsabilité sociale des organisations. Le financement participatif doit soutenir l'orientation scolaire et professionnelle .

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