Comment la responsabilité sociale a boosté les résultats du financement du GPE en Ouganda
Un engagement fort des citoyens et une responsabilité sociale peuvent aider à améliorer les résultats en matière de développement. Découvrez comment deux communautés scolaires en Ouganda sont allées au-delà du suivi du programme financé par le GPE et ont mobilisé leurs propres ressources pour combler les lacunes en infrastructures.
16 mai 2019 par Jeff Thindwa, Global Partnership for Social Accountability (GPSA)
|
Lecture : 6 minutes
Un élève devant le nouveau bloc scolaire de l'école de St. Lawrence en Ouganda. Crédit: GPSA
Un élève devant le nouveau bloc scolaire de l'école de St. Lawrence en Ouganda.

Ce blog a également été publié sur le site du GPSA (en anglais)

C'était une conversation après le dîner dans un hôtel-restaurant du district de Ntungamo en Ouganda. Les plus hautes autorités locales et leur personnel, ainsi que des conseillers locaux et des responsables de la société civile – du Centre africain pour la liberté d'information (AFIC) et de la Coalition pour le suivi des contrats en Ouganda (UCMC) -, de la pratique de la Banque mondiale en matière de gouvernance et du Partenariat mondial pour la responsabilité sociale (GPSA) revenaient sur notre longue journée de réunions et de discussions.

J'ai été inspiré par les échanges ouverts et très vivants sur la manière de résoudre les problèmes et de lutter contre la corruption en travaillant ensemble.

Le modèle de « responsabilité sociale collaborative » du GPSA allie les efforts de la société civile au travail du gouvernement dans le but de résoudre les problèmes urgents en matière de gouvernance, en particulier dans la prestation de services publics. Notre objectif commun est d’améliorer les résultats en matière de développement.

Nous avions visité deux écoles primaires locales – celles de Nyamabaare et de St. Lawrence – et rencontré des écoliers extatiques qui chantaient et dansaient, des professeurs ravis de montrer leurs écoles transformées et des parents fiers de leur rôle dans la gouvernance de l'école. 

Les blocs scolaires avaient été construits grâce à un financement du Partenariat mondial pour l'éducation (GPE) dans le cadre du Projet sur l'efficacité des enseignants et des écoles en Ouganda (UTSEP).

Des structures en boue à des bâtiments scolaires de haute qualité

Je n'avais pas vu de bâtiments d'école primaire en milieu rural de cette qualité depuis mes nombreuses années de travail dans le développement. Les structures encrassées de boue avaient cédé la place à des bâtiments modernes en briques très solides, bien meublés avec des tableaux noirs ultramodernes, des éléments de rangements intégrés pour les effets personnels des élèves, des étagères pour les livres et des installations sanitaires modernes et complètes.

Les enseignants disposent désormais de salles des professeurs pour se réunir et préparer leur travail. Encore plus impressionnant, ces bâtiments scolaires disposent désormais de rampes d'accès et d'autres fonctionnalités pratiques pour les personnes à mobilité réduite.

L’histoire de la manière dont ils sont devenus un exemple aussi impressionnant dans la construction d’écoles de qualité est l’histoire de l’engagement de citoyens et de ce que l’on appelle désormais la « responsabilité sociale » - les efforts des citoyens au-delà des urnes pour tenir leurs autorités publiques responsables de leurs actes en ce qui concerne les politiques qu’ils élaborent et les services qu’ils fournissent à la population.

Aider les citoyens à se mobiliser

En Ouganda, les citoyens ont légalement le droit de participer aux processus de prestation de services locaux, ce qui joue un rôle essentiel dans le renforcement de la démocratie et la promotion de la bonne gouvernance.

En tant que principales organisations de la société civile, l’AFIC et ses partenaires de la coalition ont facilité la participation des citoyens dans le pays et ont contribué à faire évoluer les mentalités des citoyens, passant de la passivité à la participation active, voire passionnée.

Les écoles primaires de Nyamabaare et de St. Lawrence en sont un excellent exemple. Au-delà de la simple surveillance des projets d’écoles publiques financés par le GPE, ces communautés scolaires ont mobilisé leurs propres ressources pour combler les lacunes en infrastructures – un cas de « déviance positive », qui a produit des résultats concrets inattendus.

Tout a commencé en décembre 2014, lorsque l'AFIC a bénéficié d’un financement de 650 000 dollars du GPSA pour un projet intitulé « Améliorer l’optimisation des ressources des contrats de services sociaux en Ouganda ».

Le projet devait permettre aux citoyens de contrôler les contrats de prestations de services en matière de santé, d'éducation et d'agriculture dans quatre sous-comtés sélectionnés dans cinq districts, à savoir Mityana, Mubende, Nakaseke, Ntungamo et Nebbi.

L'AFIC collaborerait avec l'UCMC et ses partenaires, notamment Transparency International Uganda (TIU), en utilisant des approches de responsabilité sociale pour atteindre cet objectif.

L’un des éléments de ce travail comprenait le suivi de l’appui du GPE à la modernisation des infrastructures scolaires dans ces cinq districts.

Le contrôle des contrats mène à des améliorations

En conséquence, l'AFIC et ses partenaires, œuvrant avec les communautés, ont sélectionné 10 candidats dans chacun des 4 sous-comtés des districts concernés et les ont formés en tant qu’observateurs communautaires. Aux côtés des fonctionnaires, des organisations de la société civile et des organisations communautaires, ils ont été formés à l'utilisation d'outils d’une efficacité prouvée pour le suivi des contrats.

Lors de la première étape, 29 contrats de trois des districts sélectionnés - Nebbi, Ntungamo et Nakaseke - ont été mis à disposition pour le suivi.

La supervision exercée par l'AFIC a révélé toute une série de problèmes, tels que la non-concordance des informations dans divers documents et d'autres lacunes susceptibles de créer des opportunités de fraude, de collusion et de mauvaise gestion des ressources par les prestataires et les responsables gouvernementaux.

L'AFIC a présenté ces résultats aux autorités des 5 districts, qui les ont trouvés similaires aux leurs. L'AFIC a également présenté des recommandations de réformes aux ministères de l'Éducation, de la Santé et de l'Agriculture.

Le ministère de l'Éducation et des Sports a réagi de manière positive, permettant à l'AFIC d'avoir accès à un plus grand nombre de contrats.

En effet, le coordinateur du Projet sur l'efficacité des enseignants et des écoles en Ouganda (UTSEP) financé par le GPE, a fourni les contrats de prestation de services des cinq districts pour la construction de 16 écoles primaires.

Pendant que les observateurs communautaires surveillaient la construction des 16 écoles, ils utilisaient également la radio et les « barazas » communautaires (forums permettant aux citoyens d’interagir avec les représentants du gouvernement) pour renseigner la population sur le suivi des contrats, ainsi que sur la manière d’accéder aux informations et de les utiliser.

Au-delà de la surveillance, les communautés gagnent en confiance

Les communautés scolaires étaient d’abord réticentes à s’impliquer dans le suivi des contrats et à demander des comptes au gouvernement.

Cependant, le fait de voir les copies des contrats et les comprendre leur a permis ainsi qu’aux chefs d’établissements, d’avoir confiance dans le programme de surveillance.

Dans ce contexte, les communautés scolaires et l’AFIC ont remporté des victoires uniques grâce à une organisation efficace des communautés, à la facilitation des OSC et à la collecte de fonds :

Premièrement, les communautés de St. Lawrence et de Nyamabaare ont pris possession des « matériaux stockés », des matériaux restants de la construction, y compris des anciens bâtiments.

Les sous-traitants avaient auparavant gardé ces matériaux, mais grâce à la médiation de l’AFIC, le ministère de l’Éducation les a obligés à les remettre aux communautés scolaires.

Cela a été appliqué dans ces deux écoles – à la plus grande joie des communautés scolaires, qui ont ensuite utilisé les matériaux pour rénover les anciennes structures et les transformer en logements pour le personnel et en classes maternelles.

Les autorités locales de Ntungamo et les responsables de la société civile de l'AFIC et de la Coalition pour le suivi des contrats en Ouganda discutant des moyens de résoudre les problèmes et lutter contre la corruption dans les contrats impliquant le gouvernement.
Rampe d'accès aux latrines de l’école primaire St Lawrence pour les personnes à mobilité réduite.
École primaire de St. Lawrence avant la construction des nouvelles structures
Des enfants jouant dans l'une des salles de classe de l'école primaire de St. Lawrence avant sa rénovation.
Jeff Thindwa et Barbara Magezi Ndamira (Banque mondiale) et Patrick Tumwine (Président du Conseil d'administration de l'AFIC) assis devant le nouveau bâtiment de l'école primaire de Nyamabaare.
Les anciens bâtiments de l'école primaire de Nyamabaare ont été rénovés grâce à des matériaux qui avaient été stockés et inutilisés. Les bâtiments sont désormais utilisés par les enseignants comme logement et pour le travail.
Bloc supérieur de salle de classe sur lequel le paratonnerre a été installé.
Blocs inférieurs de salles de classe sur lesquels des paratonnerres n’avaient pas été installés.
Réservoir de 5 000 litres financé par le programme du GPE.
Réservoir de 10 000 litres provenant des fonds propres des communautés.
Les structures scolaires de Nyamabaare ont été clôturées avec les ressources propres de la communauté et les « matériaux stockés », afin de protéger les bâtiments et les nouvelles plantations.
Un élève devant le nouveau bloc scolaire de l'école de St. Lawrence.
L’un des résultats consiste en l’augmentation accrue de la scolarisation : Nyamabaare comptait 50 élèves avant les rénovations. Ils sont désormais 543.

Deuxièmement, le sous-traitant à Nyamabaare avait installé des paratonnerres (pour protéger les écoles contre la foudre) dans un seul des deux blocs scolaires.

Un observateur communautaire l’a remarqué et l'a signalé à l'AFIC, qui a vérifié le contrat et confirmé que le contrat stipulait la nécessité de paratonnerres sur les deux blocs. Le sous-traitant a donc été obligé de s’y conformer.

Troisièmement, le GPE avait financé un réservoir d'eau de 5 000 litres à Nyamabaare. Cependant, étant situé sur une colline, le transport de l'eau représentait un défi particulier.

Pour augmenter l'approvisionnement, la communauté a utilisé les gouttières posées sur les toits financés par le GPE pour récupérer l'eau de pluie et a financé, avec ses propres ressources, un réservoir d’une capacité de 10 000 litres.

Quatrièmement, les communautés des deux écoles ont utilisé leurs propres fonds pour acheter du fil de fer barbelé, afin de protéger les bâtiments scolaires contre le vol et les arbres nouvellement plantés des animaux.

Ces deux communautés scolaires ont inspiré confiance grâce à ce qu’elles ont pu réaliser.

Leur histoire est une histoire de transformation résultant de la convergence de citoyens ordinaires informés et mobilisés, d'organisations de la société civile ayant facilité la redevabilité sociale collaborative, d'autorités locales et de ministères publics ouverts au dialogue et à la divulgation des contrats.

Le GPSA a compris depuis longtemps que la responsabilité sociale et le contrôle des citoyens peuvent être un puissant moteur d'amélioration des résultats en matière de développement.

Son soutien au suivi citoyen du programme financé par le GPE en Ouganda montre concrètement à quoi cela peut ressembler lorsqu’il fonctionne.

Alors que le GPE entame le lancement de son nouveau programme de soutien au plaidoyer et à la responsabilité sociale, il a beaucoup à apprendre du GPSA, et son expérience de longue date aux côtés de l'un des agents partenaires les plus importants du GPE, la Banque mondiale, offre une excellente base pour comprendre où et comment ce modèle peut être étendu, pour le plus grand bénéfice des communautés du monde entier.

Nous remercions vivement Barbara Magezi Ndamira (Banque mondiale), Charity Komujjurizi et l'équipe de l'AFIC, Sarah Beardmore et Chantal Rigaud (GPE) pour leurs contributions à ce blog

Lire aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas divulguée. Tous les champs sont requis

Le contenu de ce champ sera maintenu privé et ne sera pas affiché publiquement.

Texte brut

  • Global and entity tokens are replaced with their values. Explorer les jetons disponibles.
  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.