3 manières de transformer les dépenses liées à l'éducation dans notre riposte au COVID-19 pour mieux financer l’avenir

La pandémie de COVID-19 a perturbé le secteur de l'éducation comme jamais auparavant. À son pic, 9 élèves sur 10 dans le monde n'étaient pas scolarisés, et aujourd'hui, 1,2 milliard d'entre eux sont affectés par cette crise. Ne pas agir maintenant pour protéger le financement de l'éducation, aggrave le risque de ne pas réaliser l’objectif d’une éducation de qualité pour tous d’ici 2030.

02 juin 2020 par Alice Albright, GPE Secretariat
|
Lecture : 6 minutes
Une salle de classe vide à l'école de Banteay Dek au Cambodge.
En période de crise, le PME encourage des réponses coordonnées et soutient les groupes locaux des partenaires de l’éducation dans leur réponse aux besoins éducatifs des pays partenaires. Une salle de classe vide à l'école de Banteay Dek au Cambodge.
Credit: PME/Livia Barton

La pandémie de COVID-19 a entrainé la fermeture des écoles à travers le monde. Les coûts économiques et sociaux qui y sont liés sont énormes, tout comme ceux potentiellement liés aux opportunités d'apprentissage perdues.

Les gouvernements des pays en développement se sont mobilisés rapidement pour limiter l’impact immédiat du COVID-19. Ils ont lancé et mis en œuvre des initiatives d'apprentissage à distance à une échelle sans précédent en proposant du contenu éducatif via des réseaux de radio et de télévision, en formant des enseignants et en prodiguant des conseils aux parents.

Maintenir l'apprentissage pendant la pandémie et - le moment venu - rouvrir les écoles en toute sécurité a un coût. Le Partenariat mondial pour l'éducation s’est mobilisé rapidement pour aider nos pays partenaires à atténuer les effets immédiats des fermetures d'écoles, en mettant en place un fonds d'urgence COVID-19.

La demande de soutien venant des pays en développement est importante. 8 semaines seulement après l'annonce de la mise à disposition de ce fonds, le PME a reçu des requêtes de près de 50 pays, totalisant plus de 500 millions de dollars, et d'autres sont attendus dans les semaines à venir. Mais, ceci n'est que la partie visible de l'iceberg.

Le vrai choc est encore à venir

A l'image des experts de la santé qui s'inquiètent des secondes vagues d'infections, dans le domaine de l'éducation, les fermetures d'écoles ne constituent que la première phase de l'urgence. L'onde de choc économique déclenchée par la pandémie sera à l'origine de la deuxième.

Les scénarios qui se veulent optimistes (et selon lesquels les économies se redressent rapidement en 2021), prévoient que les dépenses pour l'éducation devraient stagner dans la plupart des pays et chuter dans certains. Quant aux projections les plus pessimistes par contre, elles prévoient que les budgets de l'éducation pourraient diminuer de jusqu'à 10 %, du fait que les gouvernements accorderont la priorité des fonds au secteur de la santé.

L'aide internationale à l'éducation, qui n'est revenue que récemment à ses niveaux d'avant la crise financière de 2008-2009, devrait également baisser - et ne compensera en aucun cas l'écart.

Les revenus des ménages diminueront également, car les moyens de subsistance des familles sont affectés par la pandémie de COVID-19 et les envois de fonds depuis l’étranger chutent. Il sera donc difficile pour de nombreuses familles de couvrir les frais liés à l'éducation qui, dans les pays à faible revenu, représentent une proportion plus élevée des budgets des ménages que dans les pays à revenu élevé.

Ces impacts cumulés exacerberont les inégalités existantes. Les élèves les plus pauvres et les plus vulnérables seront les plus durement touchés.

Les disparités d'apprentissage vont se creuser. Des dizaines de millions d'enfants seront privés des opportunités, de la sécurité et des connaissances qu'offre une éducation de qualité. Les 40 à 60 millions d'enfants supplémentaires qui seront poussés par la pandémie dans l'extrême pauvreté gonfleront les rangs de ceux qui sombreront dans la pauvreté des apprentissages - ou qui ne seront plus scolarisés.

Les impacts intergénérationnels de la perte de capital humain pourraient nous faire reculer de plusieurs décennies dans notre lutte pour éliminer la pauvreté dans le monde et atteindre les ODD.

Que peut-on faire pour protéger l'éducation des enfants ?

Alors que l'avenir des enfants est littéralement en jeu, nous devons travailler ensemble à trois choses : protéger les budgets de l'éducation, mieux reconstruire et combler les lacunes dans le financement de l'éducation.

  • Sauvegarder les dépenses liées à l'éducation

Notre priorité immédiate doit être de sauvegarder les dépenses liées à l'éducation, ce qui, face à une crise de liquidité potentiellement grave pour les pays en développement, suppose de libérer des ressources.

Pour de nombreux pays en développement, cela signifie affronter la question du service de la dette. Au moins 30 des pays partenaires du PME dépensent pas moins de la moitié de leurs budgets annuels de l'éducation au service de la dette publique. Les budgets devant être touchés par la récession à venir, de nombreux gouvernements pourraient devoir emprunter encore plus. Chaque dollar dépensé pour le service de la dette représente un dollar de moins pour l'apprentissage, moteur de la reprise, de la résilience et de la croissance futures.

Le G20 a retardé le service de la dette sur les prêts bilatéraux pour les pays éligibles à l'ADI, et le FMI a compensé les coûts de remboursement jusqu'en décembre 2020 pour 25 des économies vulnérables. Ces mesures sont louables, mais elles ne sont pas suffisantes. L'allègement, le report et la restructuration de la dette des pays à revenu faible et ceux de la tranche inférieure des pays à revenu intermédiaire doivent faire partie de la solution pour créer l'espace budgétaire permettant aux pays d'investir dans l'éducation.

Les pays donateurs, en dépit de leurs propres pressions économiques, devraient également maintenir leur engagement en faveur de l'éducation - en particulier pour les pays à faible revenu, où l'aide au développement représente un pourcentage plus élevé du financement de l'éducation.

  • Transformer l'éducation pour accroître l'efficience, l'efficacité et l'innovation

Avec l'augmentation des besoins et la diminution des ressources, il est encore plus essentiel que nous aidions les pays à faire en sorte que chaque dollar dépensé profite réellement aux enseignants et à l’apprentissage. Cela pourrait signifier limiter le gaspillage lors des achats, veiller à ce que les enseignants soient payés de manière transparente et à temps, ou négocier de manière plus efficace le matériel dont dépend les systèmes d'enseignement utilisés, allant des salles de classe aux manuels.

La pandémie actuelle nous offre également l'occasion de transformer les systèmes éducatifs. Les solutions d'apprentissage à distance devraient être mises à profit pour atteindre les 258 millions d'enfants qui n'étaient pas scolarisés avant la pandémie. Investir maintenant dans la résilience aux fermetures d'écoles devrait supposer de concentrer nos efforts sur la conception de l'apprentissage, afin qu'aucun enfant, fille ou garçon, ne soit laissé pour compte.

  • Innover pour combler le déficit financier

Avant la pandémie, les dépenses liées à l'éducation n’étaient pas vraiment en voie de permettre la scolarisation et l’apprentissage de tous les enfants. La pandémie de coronavirus présente le risque assez grave de nous éloigner davantage de la voie pour atteindre l'ODD 4.

La créativité est donc la clé ici, à l’instar de notre propre fonds à effet multiplicateur, un instrument financier innovant qui aide à catalyser de nouveaux soutiens externes de donateurs et d’autres entités. La communauté internationale pourrait s'appuyer sur des instruments comme ce fonds à effet multiplicateur en explorant de nouvelles sources de soutien aux systèmes éducatifs, allant de la restructuration de la dette qui protège l'investissement en capital humain à la finance mixte.

Une jeune fille faisant contrôler sa température avant d'entrer dans sa classe à l'École du Centre à Conakry, en Guinée.
Une jeune fille faisant contrôler sa température avant d'entrer dans sa classe à l'École du Centre à Conakry, en Guinée.

Rechercher des solutions pour financer notre avenir

Le PME vous invite à soumettre vos réflexions sur les questions suivantes :

  • Comment les pays peuvent-ils sécuriser le financement de l'éducation tout en menant simultanément leur riposte à la pandémie et en faisant face à la crise économique ?
  • Sur quoi les investissements devraient-ils se concentrer – à un retour à l'essentiel ou à l’amélioration de l'accès à la technologie pour permettre l'apprentissage à distance ?
  • Comment pouvons-nous utiliser ce moment sans précédent de l'histoire pour dépasser les écarts observés tant à l’intérieur qu’entre les pays ?

La capacité de millions d'enfants à pouvoir bénéficier à nouveau être en sécurité et scolarisé dépend de notre capacité à apporter des réponses à ces questions et d'accélérer les progrès pour offrir une éducation inclusive, équitable et de qualité à chaque fille et à chaque garçon. Le coût de notre inaction serait beaucoup trop élevé pour être supporté.

 

À propos de ce blog

La pandémie de COVID-19 a perturbé le secteur de l'éducation comme jamais auparavant. À son pic, 9 élèves sur 10 dans le monde n'étaient pas scolarisés, et aujourd'hui, 1,2 milliard d'entre eux sont affectés par cette crise. Plus de 80 % d'entre eux se trouvent dans des pays en développement, où les fermetures d'écoles aggravent une crise de l'apprentissage déjà urgente.

Ces perturbations sans précédent auront des conséquences immédiates sur l’apprentissage des enfants et leur bien-être. Comme dans la plupart des crises, c’est ceux qui ont déjà le plus besoin d'éducation qui paieront le plus lourd tribut. Plus les écoles restent fermées, plus les conséquences seront importantes. Et le pire est peut-être encore à venir.

Les dernières projections indiquent que la pandémie entraînera une contraction de l’économie mondiale de 3 % (en comparaison, la crise financière mondiale de 2008-2009 a entraîné une contraction de 0,1 %). Cela aura un impact significatif sur les dépenses liées à l'éducation, en particulier dans les pays en développement. Nous envisagions cette décennie comme celle pendant laquelle nous concrétiserions notre engagement commun envers l'ODD 4.

Si nous n'agissons pas maintenant pour protéger le financement de l'éducation, il y a un risque très réel que nous prenions encore plus de retard.

-----------------

Lire tous les blogs de notre série sur le financement de l’éducation pendant et après la pandémie de coronavirus

Lire aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas divulguée. Tous les champs sont requis

Le contenu de ce champ sera maintenu privé et ne sera pas affiché publiquement.

Texte brut

  • Global and entity tokens are replaced with their values. Explorer les jetons disponibles.
  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.