Obtenir un tableau complet sur le financement de l'éducation
En assurant un meilleur suivi des dépenses liées à l'éducation au niveau des pays, les gouvernements et les donateurs pourront mieux orienter les politiques et les ressources afin d'améliorer les résultats d'apprentissage de tous les enfants.
26 septembre 2016 par Alice Albright, GPE Secretariat, Suzanne Grant Lewis, UNESCO’s International Institute for Educational Planning (IIEP), et Silvia Montoya, UNESCO Institute for Statistics
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Le Vietnam a adopté le modèle Escuela Nueva de la Colombie consistant à créer des écoles utilisant une approche plus participative. Crédit: GPE/Koli Banik

La semaine dernière, la Commission internationale sur le financement de l’éducation dans le monde a publié un rapport important, appelant à un nouveau pacte entre les pays en développement et la communauté internationale, en vue de transformer les performances, l'innovation, l'inclusion et le financement en matière d’éducation.

Nous saluons ces recommandations, mais le problème est que nous ne disposons pas d’informations suffisantes sur le financement de l'éducation au sein de ces pays : d’où provient l'argent, où il va et s’il est dépensé de manière efficace.

Les statisticiens nationaux en recherche de chiffres précis doivent souvent glaner des informations à travers tout un éventail de sources incomplètes, et même les chiffres solides sur les dépenses publiques montrent seulement une partie du tableau, auquel manque les autres sources qui versent de l'argent dans l'éducation, en particulier les familles.

En l'état actuel des choses, il est presque impossible de savoir la somme d'argent dépensée au profit de l'éducation de chaque enfant dans le monde entier.

Les gouvernements ne sont pas certains du montant – total – qui va dans les systèmes d'éducation de leur pays, ce qui rend difficile le calcul pour savoir si suffisamment d’argent est dépensé aujourd'hui, ou quels seront les besoins de demain.

Par ailleurs les bailleurs de fonds ne savent pas si l’aide qu’ils apportent, incite à une augmentation des dépenses publiques en matière d'éducation, ou bien évince les ressources nationales.

Dans le cadre des objectifs de développement durable (ODD), les pays et les bailleurs de fonds se sont engagés à accroître leurs investissements dans l'éducation. L’ODD 1 préconise un renforcement des dépenses en faveur de l’éducation comme un moyen de réduire la pauvreté, alors que l’ODD 4 vise à assurer une éducation de qualité inclusive et équitable.

Nous avons donc besoin de savoir : l'enseignement primaire, par exemple, reçoit-il le soutien nécessaire pour atteindre les enfants les plus marginalisés ? L'enseignement supérieur, souvent accessible à une minorité, reçoit-il plus que sa juste part ? De toute évidence, nous avons besoin d'en savoir plus.

En suivant mieux les dépenses en matière d'éducation au niveau des pays, les gouvernements et les bailleurs de fonds peuvent mieux orienter les politiques et les ressources dans le but d’améliorer les résultats d'apprentissage de tous les enfants et les jeunes.

Une solution : le Compte national de l'éducation (CNE)

Les Comptes nationaux de l'éducation (CNE) représentent un moyen d’aller de l’avant. Ils fournissent un cadre pour une collecte des données exhaustive, le traitement et l'analyse qui couvrent tous les niveaux d'éducation, toutes les différentes sources de financement, ainsi que tous les types de prestataires de services d'éducation.

De tels exercices sont nouveaux dans le domaine de l'éducation, mais ils ont montré des résultats dans d'autres secteurs. Ils proviennent des comptes nationaux, qui mesurent d’une manière exhaustive les activités économiques d'un pays pour calculer le PIB, et des comptes « satellites » qui utilisent le même cadre général, afin de produire des sous comptes détaillés pour des secteurs spécifiques, tels que la santé et le tourisme.

Les comptes nationaux de la santé existent depuis des décennies et ont été mis en œuvre dans plus de 100 pays dans le monde.

À ce jour, cependant, les CNE n’ont été mis en œuvre que dans quelques pays. Grâce à un financement du Partenariat mondial pour l'éducation (GPE), l'Institut de statistique de l'UNESCO (ISU), l'Institut international de la planification de l'éducation de UNESCO (IIEP), et l'IIEP Pôle de Dakar utilisent la méthodologie des CNE pour améliorer l’établissements de rapports nationaux relatifs aux dépenses d'éducation dans huit pays : la Côte d’Ivoire, la Guinée, la République démocratique populaire lao, le Népal, le Sénégal, l'Ouganda, le Vietnam et le Zimbabwe.

Les données recueillies par les bailleurs de fonds de l’éducation et les prestataires de services d'éducation sont traitées en utilisant des classifications communes telles que le niveau d'éducation, le type de fournisseur ainsi que les transactions économiques.

Bien que les données ne soient pas strictement comparables d'un pays à l'autre, elles peuvent être comparées lorsqu'elles sont intégrées dans les catégories internationales. Elles sont compatibles, par exemple, avec la collecte des données de l'ISU relatives au financement de l'éducation.

Un autre avantage est que les CNE révèlent des lacunes entre ce que nous pensons savoir au sujet du financement de l'éducation, et la réalité, comme le montre un nouveau rapport intitulé Who Pays for What in Education? – qui met en évidence les principales conclusions de l'exercice du CNE dans les huit pays pilotes.

1. Les pays dépensent plus que ce que l’on pense pour l'éducation

Les dépenses allouées à l'éducation en pourcentage du PIB sont transformées lorsque nous ajoutons des données recueillies dans le cadre de l'exercice des CNE (voir infographie ci-dessous).

Avant le CNE, l'Ouganda et le Népal semblaient dépenser moins dans le domaine de l'éducation que la Côte d'Ivoire et le Vietnam (environ 2 % et 4 %, comparativement à 4,4 % et 6 % du PIB, et respectivement). Lorsque le CNE a identifié plusieurs sources de financement, le Népal a fait un bond en avant et est passé en tête : dépensant 9,3 % du PIB, contre 7,3 % pour la Côte d'Ivoire et 7,9 % pour le Vietnam.

Les pays dépensent plus que ce que l’on pense pour l'éducation

2. Les ménages sont les principaux financeurs de l’éducation

Une grande partie de cette transformation se rapporte à l'argent que les familles ordinaires injectent dans l'éducation de leurs enfants. Les ménages financent un quart des dépenses de l'éducation au Vietnam, un tiers en Côte d'Ivoire, la moitié au Népal et plus de la moitié en Ouganda. Une réalité qui a plusieurs significations : d'abord, les familles représentent une part massive du financement de l'éducation et nous devons en savoir plus sur leur contribution.

Ensuite, des problèmes en termes d’accès à l'éducation et d'équité se manifestent, lorsque la charge financière est trop lourde pour la famille. Puis, les données relatives à cette question sont rares : nous avons utilisé les données provenant d’enquêtes sur les ménages en Côte d'Ivoire, au Népal et au Vietnam, mais celles-ci ne sont pas disponibles dans tous les pays.

Les ménages sont les principaux financeurs de l’éducation

3. Les ministères de l'éducation ne sont pas toujours les principaux bailleurs de fonds gouvernementaux

Le gouvernement est le principal bailleur de fonds dans la plupart des pays pilotes (à l'exception du Népal et de l'Ouganda). Le financement du gouvernement ne signifie pas non plus uniquement le financement du ministère de l'éducation.

En Côte d'Ivoire, par exemple, les dépenses publiques consacrées à l'éducation ont augmenté de 9 % lorsque nous avons ajouté la contribution du Programme d'urgence du Président et de 17 autres ministères.

Au Zimbabwe, la collecte de données précédente avait négligé le fait que la commission de la fonction publique paie les salaires des enseignants et celui du personnel de l'éducation, ce qui représente 11 % des dépenses publiques consacrées à l'éducation.

Au Vietnam, le ministère de l'éducation est uniquement responsable de l'enseignement supérieur, et même pas de tous les établissements. Tous les autres niveaux sont décentralisés à la charge des districts et des provinces.

Les ministères de l'éducation ne sont pas toujours les principaux bailleurs de fonds gouvernementaux

Des fondements pour de meilleures données sur le financement de l'éducation

Les CNE présentent un plein engagement national à l'éducation, et peuvent être combinés à des bailleurs de fonds bien informés. Mais, on ne peut nier la complexité de leur mise en œuvre, même avec un soutien vigoureux des partenaires internationaux.

Bien que tous les pays ne puissent se précipiter directement dans un CNE intégral, ils peuvent le mettre en place étape par étape, en commençant par les dépenses publiques. La clé est de veiller à ce que la méthodologie de base soit bien ancrée, de sorte que des « blocs » supplémentaires puissent, à l'avenir, y être ajoutés.

On peut tirer des enseignements d’exercices similaires dans les secteurs de la santé, de l'agriculture et du tourisme. Les analystes et les bailleurs de fonds pourraient commencer par frapper à la porte des ministères qui ont déjà expérimenté ce processus, afin de savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Cela fournirait un précieux avantage qui pourrait aider plus de pays à mettre en place leurs propres CNE en utilisant un nouvel ensemble de lignes directrices élaborées par le biais de ce projet.

Vous en saurez certainement en consultant le nouveau rapport : Qui paie pour quoi dans l'éducation ? Les véritables coûts révélés grâce aux comptes nationaux de l'éducation, réalisé par l'ISU, l'IIPE et l'IIEP Pôle de Dakar, grâce au soutien du Partenariat mondial pour l'éducation.

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