Saisir l'opportunité de proposer une éducation aux enfants réfugiés du monde
3,5 millions d'enfants réfugiés dans le monde ne vont pas à l'école. Un nouveau Pacte mondial pour les réfugiés promet de générer un nouvel élan et de l'énergie pour répondre à la crise mondiale des réfugiés
08 mai 2018 par Joseph Nhan-O'Reilly, International Parliamentary Network for Education
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Lecture : 10 minutes
Comme beaucoup d'autres, cet enseignante communautaire est retournée à l'école dans le cadre des classes de rattrapage soutenues par le GPE en République centrafricaine. Crédit: UNICEF/KIM
Comme beaucoup d'autres, cet enseignante communautaire est retournée à l'école dans le cadre des classes de rattrapage soutenues par le GPE en République centrafricaine.

Il y a près de deux ans, le 19 septembre 2016, lors du pic de la crise de réfugiés en Europe, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants. Cette déclaration a été accueillie comme le fondement, pour la communauté internationale, d’une nouvelle approche des vastes mouvements de réfugiés et de migrants, ainsi que des situations de réfugiés prolongées.

La Déclaration s’engageait à veiller à ce que les enfants réfugiés soient scolarisés et engagés dans un apprentissage quelques mois après le passage d'une frontière internationale.

Depuis cette promesse, les 3,5 millions d’enfants réfugiés qui n’ont pas accès à l’éducation ont perdu plus d’un milliard de jours d’école. Le plus terrible, c’est que chaque jour, 1,9 million de jours d’école supplémentaires sont perdus.

Nombre des enfants ayant fui leur foyer pour chercher refuge dans d’autres pays ont bien sûr déjà perdu des années d’école, et nombreux sont ceux provenant d’états pauvres et touchés par les conflits qui n’avaient même jamais été scolarisés.

Pour les enfants réfugiés qui ont accès à l’éducation, la qualité de l’enseignement prodigué est souvent médiocre. Le tableau est particulièrement sombre dans les pays où une troisième génération d'enfants est née en déplacement, et où les perspectives d'un retour sécurisé dans le pays d’origine semble un rêve lointain.

L’argument en faveur de l’éducation des réfugiés est très clair. L’éducation fournit aux réfugiés les bases dont ils ont besoin pour se rétablir et forme un véritable lien entre l’intervention d’aide humanitaire, la résilience et le développement à long terme. Au cours du déplacement, le besoin d’une éducation dans un environnement sécurisé, enrichissant, porteur d’espoir et ouvert sur l'avenir, est essentiel.

Le sujet est urgent : les enfants réfugiés ne peuvent plus attendre qu'on tergiverse

Tenir la promesse de la Déclaration de New York

Des consultations sont en cours pour développer un Programme d’action dans le cadre du Pacte mondial sur les réfugiés qui fixe les obligations des états nationaux et d’autres pour honorer les engagements de la Déclaration de New York.

Le Programme d’action est une occasion unique d’imprimer un changement radical dans la façon dont le monde fait face aux besoins des réfugiés et soutient les communautés qui les accueillent, notamment en devisant comment garantir un accès à une éducation de qualité pour les enfants réfugiés comme pour les enfants des communautés d’accueil.

La dernière ébauche du Programme d’action est rassurante quant à l’amélioration de l’accès à une éducation de qualité, mais doit être renforcée par deux moyens clés.

  1. Soutien aux pays d’accueil pour intégrer les élèves réfugiés dans leur système éducatif national
  2. Cette inclusion des réfugiés dans le système éducatif national d’un pays dont ils recherchent la protection, est le moyen le plus pratique et le plus durable de permettre aux enfants déplacés de bénéficier d’opportunités d’apprentissage.

    Le nombre de pays qui ouvrent leurs écoles aux enfants réfugiés est croissant, mais il s’agit souvent pour leur système éducatif déjà essoufflé d’une véritable lutte pour accueillir de grands nombres d’enfants réfugiés.

    Le Tchad, malgré le fait que l’accès à une éducation de qualité demeure un défi important, fut par exemple le premier pays à inclure une composante « éducation d’urgence » ciblant les enfants réfugiés dans son plan intérimaire de l’éducation. Le Tchad a également eu accès à un financement pour le plan grâce à la possibilité de financement accéléré du Partenariat mondial pour l'éducation.

    L’an dernier, la Première Conférence ministérielle régionale sur l’éducation des réfugiés des États membres de l’IGAD a vu Djibouti, l’Érythrée, l’Éthiopie, le Kenya, la Somalie, le Soudan du Sud, le Soudan et l’Ouganda adopter la Déclaration de Djibouti, dans laquelle ils d’engagent tous à fournir aux enfants réfugiés un accès à leur système éducatif national sans discrimination.

    La générosité que ces pays et d’autres pays d’accueil de réfugiés démontrent en ouvrant leur système éducatif national à ces derniers se doit de trouver un soutien pratique et technique égal de la part de la communauté internationale.

    Le Programme d’action doit comprendre ce type d’engagement, notamment la responsabilité partagée par les bailleurs, le Partenariat mondial pour l’éducation, Education Cannot Wait et la Banque mondiale, d'augmenter rapidement le soutien technique et matériel aux pays d’accueil qui se sont engagés à intégrer des réfugiés dans leur système éducatif national.

  3. Action pratique pour commencer à combler le déficit de financement de l'éducation des réfugiés
  4. 86 % des réfugiés du monde vivent dans des pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire. Ces pays ont besoin d’un soutien financier additionnel pour adapter leurs services éducatifs, à la fois pour les enfants réfugiés et ceux de la communauté d’accueil. Sans ce soutien, la responsabilité des vastes mouvements de réfugiés ne sera pas correctement partagée.

    Le programme d’action actuel reconnaît la nécessité de ressources supplémentaires pour améliorer l'accès à l’éducation des réfugiés et des enfants des communautés d’accueil, mais n’articule pas les mesures pratiques pour combler ce déficit de financement.

    Un plan global chiffré pour l'éducation des réfugiés, axé sur le financement de l’accès pour les enfants actuellement non scolarisés et l’amélioration des acquis scolaires pour les élèves réfugiés et ceux de la communauté d'accueil, serait un bon point de départ pour mobiliser les fonds nécessaires.

    Celui-ci serait basé sur des estimations nationales de coût dans les pays d’accueil et utiliserait les coûts communs pour parvenir à un degré de comparabilité.

    La responsabilité du calcul des coûts de l’éducation serait partagée par un consortium d’organisations mandatées pour l'éducation des réfugiés et des communautés d’accueil, notamment l’UNHCR, l’UNICEF, la Banque mondiale, le Partenariat mondial pour l’éducation, Education Cannot Wait et l’UNESCO, avec le soutien et l’engagement des gouvernements des états donateurs et ceux des pays d’accueil, ainsi que des organisations de la société civile ayant une expertise pertinente.

    Les chiffrages relatifs à l’éducation produits en amont de la Conférence de Londres sur le soutien à la Syrie et aux pays de la région en 2016 ont été essentiels pour parvenir à une compréhension commune de l’ampleur de la difficulté et du financement requis pour y faire face efficacement. Les chiffrages constituent une partie du Document stratégique sur l’éducation dans la crise syrienne, qui identifie les fonds nécessaires et fixe les méthodes qui seraient utilisées pour les dépenser.

    De même, les chiffrages produits par les organisations de la société civile pour la scolarisation pour tous des réfugiés du Soudan du Sud en amont du Sommet de la solidarité de 2017 en Ouganda ont été essentiels dans la décision du Gouvernement ougandais de produire des chiffrages officiels, qui font désormais partie du plan d’intervention auprès des réfugiés et des communautés d’accueil en matière d’éducation.

    Les chiffrages ne constituent pas la panacée. Mais sans eux et les hypothèses de travail qui les sous-tendent, il est difficile de solliciter l’attention nécessaire, et encore moins les financements, pour accomplir la tâche à venir.

Les réfugiés et les communautés d’accueil méritent mieux

L’objectif du Pacte mondial sur les réfugiés est de générer un nouvel élan et de renouveler l’énergie pour répondre à la crise mondiale des réfugiés.

Les parents et les enfants réfugiés identifient sans cesse l’accès à une éducation de qualité comme une de leurs préoccupations prioritaires. Malgré les difficultés auxquelles ils sont confrontés, la détermination des communautés de réfugiés à offrir une éducation à leurs enfants est une véritable source d’inspiration. Pour avoir de la valeur, le Programme d’action qui s’inscrit dans le cadre du Pacte mondial doit s’engager à des actions importantes à la hauteur de la détermination et de la créativité des réfugiés, et de la générosité des pays d’accueil.

Soutenir ces pays pour garantir l’accès à des opportunités d’apprentissage de qualité aux enfants réfugiés et identifier le coût de ce soutien au sein d’un plan de mise en œuvre semblent le minimum requis.

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