L’inégalité des sexes : une grande menace pour l’avenir de l’Afrique

Organisé pour la première fois en Afrique, le thème du Sommet mondial sur le genre 2019 était « Éliminer les obstacles à l'égalité des sexes ». Il a vu la communauté internationale répondre à l’appel visant la suppression des obstacles à la pleine participation des filles et des femmes au développement socioéconomique du continent.

16 décembre 2019 par Victoria Egbetayo, GPE Secretariat
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Lecture : 6 minutes
Une femme faisant une présentation au Sommet mondial sur le genre 2019
Une femme faisant une présentation au Sommet mondial sur le genre 2019
Credit: PME/Victoria Egbetayo

La technologie est une force disruptive toujours plus grande, tant pour le bien (en améliorant l'existence humaine) que sans doute pour le mal aussi (de nombreux emplois étant confiés aux machines et à l'intelligence artificielle).

Comme avec la technologie, nous avons besoin d'approches novatrices sur la manière d’atteindre le développement, faire face à la crise de l'apprentissage et éviter de continuer à avoir des millions de filles non scolarisées et/ou allant à l'école sans toutefois apprendre quoique ce soit ou achever leurs études.

Sans une action drastique, la communauté internationale aura sacrifié plusieurs générations en ne réalisant pas les ODD d'ici 2030. L'Afrique est en première ligne dans les discussions et la lutte pour l'égalité des sexes et les transformations profondes en matière de genre.

Un ensemble unique de dirigeants et d'acteurs africains tentent d'endiguer la tendance pour remédier à ce problème.

Les femmes et les filles sont toujours loin derrière

Les femmes sont responsables de 60 % du travail effectué dans le monde, mais ne gagnent que 10 % des revenus et ne possède que 1 % des biens. En Afrique, 70 % des femmes ne sont financièrement indépendantes. Le continent a un écart de financement entre les hommes et les femmes de 42 milliards de dollars.

Selon le rapport de l'Institut McKinsey intitulé Power of Parity Report: Advancing Women’s Equality in Africa (en anglais), la parité des sexes en Afrique est de 0,58 (1 serait la parité complète). Pour le continent, atteindre la parité complète pourrait prendre jusqu’à 140 ans, si aucune action drastique n’est menée.

Il est urgent de combler l'écart entre les sexes pour les femmes et les filles dans tous les domaines de la vie à l'échelle mondiale, et en particulier en Afrique, les filles risquant d'être laissées pour compte – actuellement des millions ne sont pas scolarisées et 4 millions pourraient ne jamais mettre les pieds dans une salle de classe (en anglais).

Les femmes et les filles africaines subissent des désavantages dans le secteur de l'éducation et de la formation dès les premières années et ce, même si 25 % des représentants politiques en Afrique sont des femmes, devant la moyenne mondiale qui est de 21 % (bien que limitée à un petit sous-ensemble de pays).

Pourtant, la promotion de l'égalité des femmes dans l'économie africaine pourrait entraîner une augmentation de 10 % du PIB, soit 316 milliards de dollars américains d'ici 2025.

Alors que le monde est confronté à une évolution rapide et reconnait le rôle crucial de l'éducation et des compétences pour les jeunes de demain, l'Afrique est le pivot du changement.

Tirer parti de la dynamique des événements mondiaux

Le Sommet de la Conférence internationale sur la population et le développement 25 (CIPD25) à Nairobi en octobre 2019 a atteint des engagements révolutionnaires visant à combler l'écart entre les sexes en matière d'égalité pour les femmes et les filles, incluant les droits en matière de santé sexuelle et reproductive ainsi que l'élimination des pratiques néfastes comme le mariage d’enfants, qui limitent les perspectives de la vie d'une fille, dont son éducation.

La CIPD25 a été un moment décisif pour une réflexion et une action mondiales sur ce qui reste à faire afin de garantir que les cibles des ODD soient atteintes. Mais si la CIPD25 a été un tournant, le Sommet mondial sur le genre 2019 à Kigali, fin novembre, a présenté un océan de possibilités, l'Afrique s’engageant à combler l'écart entre les sexes de manière urgente.

De nombreux dialogues, meilleures pratiques et solutions innovantes visant à réaliser l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes en Afrique et dans le monde ont été proposés lors du Sommet :

  • élargir l'accès au financement et au crédit pour les entreprises dirigées par des femmes
  • favoriser un environnement propice à l'égalité des sexes et à l'investissement dans une optique de genre
  • assurer la participation et la voix des filles et des femmes
  • briser non pas le « plafond de verre » mais le « plafond de ciment » pour le leadership des femmes africaines.

Le Sommet a changé la donne sur ce que la réalisation de l'égalité des sexes pourrait signifier pour les femmes et les filles. À l'instar de l'action pour le climat, les femmes et les jeunes défendent un nouvel ordre mondial.

Il a établi un lien clair entre le manque d’autonomisation économique des femmes et les obstacles à l’éducation des filles. Comme l'a exprimé avec force la Première Dame du Kenya, Margaret Kenyatta :

Le manque d'accès des femmes au crédit et au contrôle financier pour prendre des décisions en matière d'éducation et de santé est un obstacle à l'égalité des sexes.

Margaret Kenyatta

Bien que l'Afrique enregistre des progrès sur l'amélioration des taux d'achèvement, en particulier la parité au niveau du primaire entre filles et garçons, cela est difficile à atteindre au niveau du secondaire. L'apprentissage est faible et le nombre d'enfants non scolarisés reste alarmant.

L'élimination des goulots d'étranglement financiers permet aux femmes de participer à la prise de décisions à la maison – transformant ainsi les familles et les communautés.

Plusieurs intervenants ont établi des liens entre des questions telles que le mariage des enfants, les pratiques néfastes à l’égard des filles, la violence sexiste et le manque de sécurité, le tout étant dû au manque d’autonomisation économique des femmes.

La présidente Joyce Banda du Malawi a déclaré avec passion :

« Les gens naissent avec 30 % de traits de leadership, mais 70 % de cela s’ajoute à l'éducation, l'environnement, la société. Qu'en est-il des filles nées dans une pauvreté absolue - ces 30 % de traits de leadership ne sont ni nourris, ni cultivés et ni autorisés à grandir. »

Les participantes ont plaidé pour des approches et des investissements davantage intégrés qui ciblent les jeunes et les adolescents et qui s'attaquent au manque de contrôle des ressources des femmes en vue d'approfondir les progrès mondiaux en matière d'éducation des filles.

Le Président Paul Kagame du Rwanda, pays hôte du Sommet, durant son discours.
Le Président Paul Kagame du Rwanda, pays hôte du Sommet, durant son discours.

L'Afrique défie le statu quo

Organisé pour la première fois en Afrique, le thème du Sommet mondial sur le genre 2019 était « Éliminer les obstacles à l'égalité des sexes ». Le Sommet a été accueilli par le gouvernement du Rwanda et organisé par la Banque africaine de développement (BAD), partenaire du PME et co-membre du Conseil consultatif pour l'égalité des sexes du G7.

Le Sommet a vu la communauté internationale répondre à l’appel visant la suppression des obstacles à la pleine participation des filles et des femmes au développement socioéconomique du continent.

J’ai représenté le PME au sommet, afin d’apporter notre soutien à la promotion de l’égalité des sexes dans et par l’éducation, en particulier pour exploiter le dividende démographique de l’Afrique et faire progresser le capital humain au service du développement durable.

J'ai partagé avec les partenaires l'approche innovante du PME en matière d'égalité des sexes, qui est au cœur des systèmes éducatifs des pays partenaires - de la planification au suivi-évaluation des plans, programmes et interventions du secteur de l'éducation, en passant par l’analyse, la politique et la budgétisation sectorielle.

Grâce à l'initiative de planification sectorielle de l'éducation sensible au genre (GRESP), le PME et ses partenaires ont organisé plusieurs ateliers régionaux sur la prise de mesures concrètes pour que les plans sectoriels et leur mise en œuvre soient véritablement sensibles au genre.

Déjà effective dans 26 pays, la GRESP se développe désormais avec l'Initiative Priorité à l’égalité approuvée par le G7, la portant ainsi à un tout autre niveau.

Les efforts du PME pour faire face à la crise de l'apprentissage et œuvrer avec les pays pour placer le genre au centre des politiques et des interventions en matière d'éducation contribueront aux progrès sur le genre au sein du continent.

Une approche transformatrice du genre doit être délibérée et utile

La BAD sait que le changement commence à la maison et déploie un système de marqueurs sexospécifiques pour traiter, suivre et promouvoir l'intégration de la dimension de genre dans toutes ses opérations, avec des spécialistes du genre comme membres des équipes de projet et des opérations.

Conscient de l'ampleur du défi, le PME intensifie également son attention sur le genre dans toutes ses opérations.

Au PME, nous estimons que le changement doit être délibéré, ciblé et transformateur alors que nous entrons dans notre prochaine période stratégique. Il sera essentiel de tirer parti des partenariats stratégiques entre les institutions, les parties prenantes, les régions, ainsi que les secteurs, et d'intégrer davantage le genre dans le partenariat et le modèle de fonctionnement.

En perspective du Forum Génération Egalité et Pékin+25

Nous sommes à une époque où atteindre l'égalité et l’équité entre les sexes n'a jamais été aussi urgent. Le monde est en constante transformation avec l'urgence climatique, la crise de l'apprentissage, les perturbations technologiques et les déséquilibres socio-économiques et politiques.

L’essor et le déclin des nations dépendent de la réduction de cet écart - maintenant plus que jamais.

Le PME s’engage à aider les pays partenaires à progresser sur la voie de l’égalité des sexes et à œuvrer avec tous nos partenaires pour faire avancer les choses au cours de la « décennie d’action » restante, afin de réaliser les objectifs de l’Afrique et du monde. Parce que lorsque les femmes et les filles s'épanouissent, le monde s’épanouit également.

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