Le mariage d’enfants coûtera des dizaines de milliards de dollars aux pays d'Afrique de l'Ouest et du Centre d'ici 2030
Des écolières à Dakar, au Sénégal. Crédit: Banque mondiale/Sarah Farhat

Le coût de ne pas éduquer les filles au niveau secondaire sera encore plus élevé.

Selon une nouvelle étude de la Banque mondiale financée par le Partenariat mondial pour l'éducation et Children’s Investment Fund Foundation (CIFF), le mariage des enfants ou mariage précoce coûtera des dizaines de milliards de dollars aux pays d'Afrique de l'Ouest et du Centre. Le coût de ne pas éduquer les filles au niveau secondaire sera encore plus élevé.

Mettre fin au mariage précoce et permettre aux filles de terminer leurs études secondaires contribuerait à ce que les femmes aient moins d'enfants et les aient plus tard dans la vie. Ceci améliorerait leurs revenus à l'âge adulte, leur bien-être et leur capacité à gérer elles-mêmes leurs vies, et réduirait les risques sanitaires pour les jeunes enfants.

Une nouvelle série de notes sur l'éducation des filles et le mariage précoce en Afrique de l'Ouest et du Centre a été présentée lors d'une réunion de haut niveau sur l'abolition du mariage précoce dans la région tenue aujourd'hui à Dakar. Ces notes indiquent que la prévalence du mariage précoce (union formelle ou informelle avant l'âge de 18 ans) n'a diminué que lentement dans la région au cours des 25 dernières années. Dans 22 pays d'Afrique de l'Ouest et du Centre pour lesquels une analyse détaillée a été effectuée, en moyenne 39 % des femmes âgées de 18 à 22 ans se sont mariées avant 18 ans et 30 % ont eu leur premier enfant avant l'âge de 18 ans selon les dernières enquêtes disponibles. En ce qui concerne l'éducation des filles, bien que les progrès aient été substantiels au niveau primaire, les progrès en matière d'achèvement des études secondaires ont été limités, avec seulement 13,5 % de filles en moyenne dans les 22 pays terminant leurs études secondaires à la date de la dernière enquête auprès des ménages (dernière enquête Démographie et Santé ou enquête MICS).

"Les progrès vers la réduction du mariage précoce et l'amélioration de l'achèvement de l'enseignement secondaire ont été lents en Afrique de l'Ouest et du Centre", a déclaré Quentin Wodon, auteur principal du rapport. "Le mariage précoce et un faible niveau d'instruction privent les jeunes filles de leur avenir. Ils ont également des conséquences négatives majeures pour leurs enfants et leurs communautés. Mettre fin au mariage précoce et éduquer les filles n'est pas seulement moralement la bonne chose à faire, mais c'est aussi un investissement économique intelligent."

En Afrique de l'Ouest et du Centre, deux naissances sur trois sont probablement dues au mariage précoce (enfants nés d'une mère de moins de 18 ans). Si le mariage précoce était aboli, les taux de fécondité pourraient être réduits d'environ 10 % dans de nombreux pays de la région. Grâce à une croissance démographique plus faible, l’abolition du mariage précoce aujourd'hui pourrait générer des bénéfices en termes de niveaux de vie de plus de 50 milliards de dollars américains par an d'ici 2030 (en parité de pouvoir d'achat). Si toutes les filles pouvaient terminer leurs études secondaires, les réductions du taux de fécondité et les avantages économiques associés seraient encore plus importants.

L'analyse suggère également que mettre fin au mariage précoce, et réduire ainsi les grossesses précoces, ainsi qu'améliorer le niveau d'instruction des filles, réduiraient les taux de mortalité et de retard de croissance des enfants de moins de cinq ans (malnutrition). Pour l'Afrique de l'Ouest et du Centre, les bénéfices attendus de la baisse de la mortalité des moins de cinq ans et de la baisse de la malnutrition suite à l’abolition du mariage précoce pourraient atteindre près de 5 milliards de dollars américains par an d'ici 2030.

Un autre avantage important de l’abolition du mariage précoce et de l'éducation des filles serait une augmentation des revenus attendus des femmes sur le marché du travail. Les femmes qui travaillent aujourd'hui auraient eu des revenus plus élevés si elles n'avaient pas été mariées pendant leur jeunesse et si elles avaient pu poursuivre leurs études.

Enfin, alors que l'impact de l'abolition du mariage précoce sur un éventail d'autres domaines - allant d'une plus grande capacité de décision des femmes au sein du ménage à des taux plus élevés d'enregistrement des naissances à l’état civil - n'est pas systématiquement aussi élevé, promouvoir l’éducation des filles aurait un impact important.

L'analyse souligne également qu'il existe une relation étroite entre le mariage précoce, les grossesses précoces et le niveau de scolarité des filles. Mettre fin au mariage précoce contribuerait à améliorer le niveau d'éducation des filles. Inversement, garder les filles à l'école est l'un des meilleurs moyens de mettre fin au mariage précoce. Pour retarder le mariage, les filles et les parents ont besoin d'une alternative viable. La scolarisation peut être cette alternative, et il existe des exemples d'interventions prometteuses dans la région qui ont réussi à retarder le mariage et à garder les filles à l'école.

La nouvelle analyse pour l'Afrique de l'Ouest et du Centre fait suite à une analyse réalisée par la Banque mondiale pour une étude antérieure sur les impacts économiques du mariage précoce au plan global en partenariat avec l’International Center for Research on Women. Cette étude a également été cofinancée par le Partenariat mondial pour l'éducation. La nouvelle analyse de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre a été étendue à un plus grand nombre de pays de la région, à l'impact de l'éducation des filles en plus de celui du mariage précoce, à l'analyse des facteurs conduisant au décrochage scolaire ou au mariage précoce, et à l’analyse des interventions qui peuvent améliorer l'éducation des filles et mettre fin au mariage précoce.

Des écolières à Dakar, au Sénégal. Crédit: Banque mondiale/Sarah Farhat

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