4 éléments à prendre en compte dans les programmes de remise à niveau dans le secteur de l'éducation

La pandémie de COVID-19 ayant pertubé l'apprentissage de millions d'enfants, les programmes de remise à niveau apparaissent comme un moyen efficace de limiter et rattraper les éventuelles pertes d'apprentissage.

14 décembre 2021 par Avni Gupta-Kagan, Avem Education Partners, Sameer Sampat, Global School Leaders, et Max Silverman, University of Washington Center for Educational Leadership
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Lecture : 4 minutes
Jeune fille étudiant dans sa salle de classe dans le Comté de Murun en Mongolie. Crédit : Khasar Sandag / Banque mondiale
Jeune fille étudiant dans sa salle de classe dans le Comté de Murun en Mongolie.
Credit: Khasar Sandag / Banque mondiale

De nombreux systèmes éducatifs adoptent la même approche quand il s’agit de trouver une solution à ce problème : le développement de compétences fondamentales, soutenu par la remédiation, ou un enseignement adapté au niveau réel d'apprentissage des élèves.

Cette approche est essentielle pour répondre aux besoins des élèves et les aider à développer des compétences fondamentales en matière de lecture, d’écriture et de calcul. Dans le même temps, comme pour tout « médicament », il est important de prendre en compte une série de conditions préalables et d'effets secondaires potentiels qui pourraient se produire.

Tout comme un médecin vous informe des risques liés à la prise d'un médicament et des effets secondaires qu'il pourrait engendrer, un bon chef d'établissement doit s'assurer que les avantages à mettre l'accent sur l'acquisition par les élèves des compétences fondamentales (via les cours de remise à niveau) l'emportent sur tout dommage potentiel.

Nous vous proposons ici quatre éléments à prendre en compte par les systèmes éducatifs dans la mise en œuvre de programmes de remise à niveau à l'intention des élèves. Chacun de ces « effets secondaires » peut être géré par un bon leadership scolaire.

1. Un programme de remise à niveau qui ne suscite pas l’engagement, la joie et la curiosité des élèves risque de ne pas les intéresser du tout. Les élèves arriveront à l'école avec de nombreux besoins fondamentaux en matière de santé et de sécurité auxquels les enseignants et les écoles doivent répondre. En outre, pour aider les élèves à s'épanouir, nous devons nous assurer qu’ils sont engagés dans le processus, contents et curieux. Par exemple, pour aider les élèves qui ont des lacunes en matière de lecture et d’écriture, nous utilisons généralement des textes simples. Bien que les élèves soient capables de les décoder, leur contenu ne les intéresse pas toujours et ils ne le comprennent pas toujours forcément. Trouver des textes simples mais d'intérêt pour eux, ou identifier des moyens d'équilibrer la lecture de base avec des discussions de groupe sur des textes meilleurs permettra aux élèves de s’impliquer davantage, et aux enseignants d’approfondir les discussions avec leurs élèves. Les chefs d'établissement ont un rôle important à jouer en aidant les enseignants à accéder à ces ressources, à établir des programmes significatifs et à créer des attentes quant à la manière dont les élèves participent à la lecture de textes.

2. Les enseignants qui s'efforcent de remédier aux difficultés d’apprentissage des élèves sans croire en leurs capacités peuvent causer plus de tort que de bien. Les chefs d'établissement doivent travailler avec les enseignants pour aborder les besoins d'apprentissage en croyant fermement aux capacités des élèves. Nos travaux ont montré que dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, en particulier, un nombre important d'enseignants ne croient pas vraiment aux capacités d'apprentissage des élèves. Si les enseignants ne croient pas en leurs capacités, les élèves peuvent rester bloqués dans des groupes de rattrapage. Les élèves qui sont dans des groupes de niveau supérieur ont une courbe d'apprentissage qui finit par être beaucoup plus abrupte que ceux qui sont dans un groupe de rattrapage, simplement parce que les enseignants croient qu'ils peuvent s’améliorer. Nous devons aborder la remédiation avec prudence et en portant une réelle attention au développement de l'état d'esprit des enseignants. Les chefs d'établissement doivent surveiller attentivement les regroupements et s'assurer que les élèves ne sont pas maintenus dans des groupes de plus faible niveau, tout en ayant des conversations explicites avec les enseignants sur les capacités et les convictions des élèves.

3. Dans le même ordre d'idées, si les programmes de remise à niveau et d’éducation accélérée qui prescrivent des étapes particulières peuvent être très utiles avec les enseignants moins qualifiés, nous devons continuer à améliorer la qualité du personnel en investissant dans leur développement. Souvent, les enseignants ne sont pas en mesure de comprendre où en sont réellement les élèves dans leur parcours d'apprentissage, quelles idées reçues ils ont, et comment enseigner un concept de plusieurs manières pour aider les élèves à l'assimiler. Ce manque de compétences peut souvent conduire les enseignants à ne pas croire en la capacité d'apprentissage des élèves. À l'heure actuelle, les formations de développement professionnel sont souvent dispensées aux enseignants loin des établissements scolaires dans lesquels ils travaillent, les privant ainsi de temps d'enseignement et leur donnant l'impression que les sessions de formation sont éloignées des réalités quotidiennes de la salle de classe. Cependant, les chefs d'établissement peuvent être qualifiés et habilités à améliorer les compétences des enseignants dans des domaines ciblés (tels que le questionnement en classe, la réponse aux besoins individuels des élèves, l'utilisation de l'évaluation formative, par exemple), afin que les enseignants soient mieux à même de diagnostiquer le niveau de compréhension des élèves et d'adapter leurs interventions de manière plus précise. Sans un investissement parallèle important dans le développement professionnel des enseignants sur place, sous la direction des chefs d'établissement, la remédiation ne sera qu'une solution à court terme.

4. Mettre en œuvre des programmes de remise à niveau qui n’accordent pas une attention particulière à l'équité pourrait conduire à la perpétuation d'injustices systémiques. En cherchant à comprendre où en sont les élèves, nous devons comprendre qui a été laissé pour compte et pourquoi. Nous devons nous assurer que nous ne perpétuons pas les structures inéquitables, qu'elles soient basées sur le sexe, la classe, la caste, la race, le handicap, la langue ou d'autres critères. Une grande partie de la poussée vers l’éducation accélérée aux États-Unis est due au fait que les programmes de remédiation laissaient souvent les élèves afro-américains s’ennuyer dans des groupes de niveau inférieur, ne permettant à ces derniers de ne progresser que de façon marginale. En l'absence de données réelles et d'une véritable prise en compte de cette réalité, nous constatons souvent que ces inégalités sont renforcées plutôt que surmontées. Les chefs d'établissement doivent prêter attention à leurs données, comprendre leur histoire et s'assurer que leurs écoles bouleversent ces modèles au lieu de les consolider.

Nous soutenons la recherche sur l'efficacité des programmes d'enseignement ciblé tels que les programmes d'enseignement ciblé par niveau d'apprentissage recommandés dans un récent rapport de la Banque mondiale. Mais, nous savons trop bien qu'un programme à lui seul ne résout pas un problème, et que tout programme peut comporter des risques.

Ces risques doivent tous être soigneusement gérés par un chef d'établissement à la hauteur de la tâche, qui sera en mesure d'instaurer une culture d'attentes élevées, de mettre l'accent sur l'équité, de soutenir le développement professionnel des enseignants et de promouvoir des pratiques qui suscitent la curiosité et la joie.

Il ne s'agit pas ici de dire que le chef d'établissement doit faire tout ce qui précède. Au contraire, en tant qu'écosystème éducatif, nous devons investir dans la formation et le soutien des chefs d'établissement, leur donner l'autonomie nécessaire pour effectuer le travail décrit ci-dessus et renforcer également les compétences des enseignants.

Cependant, sans cet accent, la remédiation pourrait avoir des résultats dangereux, car les écoles pourraient créer des situations dans lesquelles les préjugés implicites envers certains élèves ou groupes d'élèves ralentiraient par inadvertance leur progression et leur développement.

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Commentaires

Excellents articles.
Toutes mes félicitations

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