Pourquoi ne laisser aucun garçon de côté en matière d'éducation est-il essentiel ?

Nous savons comment éduquer les filles certes, mais savons-nous comment éduquer les garçons ?

18 décembre 2019 par Mary Burns, Escola Superior de Educação de Paula Frassinetti
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Deux élèves de l'école Escuela Nueva en Colombie en octobre 2014. Crédits : Mary Burns
Deux élèves de l'école Escuela Nueva en Colombie en octobre 2014. Crédits : Mary Burns
Credit: Mary Burns

Vous avez plus de chances d’être éduqué sur cette planète si vous êtes un homme. À l'échelle mondiale, des millions de garçons de plus que de filles vont à l'école. En Afrique subsaharienne, les garçons ont beaucoup plus de chances que les filles de fréquenter le primaire et le secondaire. Et même si l'écart se réduit, les garçons obtiennent généralement de meilleurs résultats dans les évaluations internationales en sciences et en mathématiques (RMSE, 2015).

Il n’est donc pas surprenant que, compte tenu de ces inégalités, la communauté internationale s’intéresse de plus en plus à l’éducation des filles qui s’est avéré être un investissement très rentable. Les femmes éduquées sont en meilleure santé ; font moins d'enfants et ont des revenus plus élevés ; prennent mieux soin d'elles et de leurs enfants ; et s’assurent que leurs enfants sont éduqués. Ces avantages profitent à des générations entières, à leur communauté et à la société dans son ensemble.

De plus, une fois à l'école, les filles ont plus de chances d'atteindre les classes supérieures de l'enseignement primaire (la Gambie, le Malawi et le Népal en sont trois exemples). Lorsque les systèmes d’enseignement secondaire sont bien développés - et que les filles n’en sont pas sorties pour se marier par exemple - elles ont plus de chances que les garçons de terminer leurs études secondaires (RMSE, 2018). En effet, dans la plupart des pays d’Europe, d’Amérique latine, des Caraïbes et des États-Unis, les filles achèvent leurs études secondaires à un taux plus élevé que les garçons (RMSE, 2018).

C’est généralement vrai, quel que soit le degré de richesse ou de pauvreté d’un pays. En termes d'enseignement supérieur, dans le monde entier - à l'exception de la Turquie, de la Corée, de la Grèce et de l'Égypte -, les femmes s'inscrivent et terminent leurs études universitaires à des taux de plus en plus élevés par rapport à leurs homologues masculins.

Un monde d’hommes peut-être, mais qu’en est-il de l’éducation ?

Le travail est loin d’être achevé en termes d’accès équitable à l’éducation pour les filles, mais il semble que la tendance soit à une progression des taux de scolarisation des filles. Cependant, on ne peut pas en dire autant des garçons.  

Dans l'Union européenne, en Australie, dans les Amériques et dans une grande partie de l'Asie, les garçons sont plus susceptibles d'abandonner leurs études, de redoubler, d’haïr l'école, d’avoir des problèmes de discipline et de moins bons résultats en termes d'évaluation de l'aptitude à la lecture (RMSE, 2015 & 2018 ; OCDE, 2015).

À l'exception de l'Afrique subsaharienne, cela est vrai presque partout. Dans une grande partie de l'Europe, en Amérique latine, dans les Caraïbes, en Asie du Sud-Est et aux États-Unis, les garçons sont beaucoup plus susceptibles de quitter l'école que les filles ; et plus de garçons que de filles ne sont pas scolarisés.

Les personnes les moins performantes dans le cadre de programmes tels que le PISA - celles qui ne maîtrisent aucune matière - sont en majorité des hommes (OCDE, 2015). Ces problèmes n'affectent pas les garçons issus de ménages riches, mais uniquement ceux issus des ménages plus pauvres – et ce, presque partout (Kuper et Jacobs, 2019).

Cet écart croissant entre les sexes ne suscitera peut-être pas trop de sympathie - après tout, les systèmes éducatifs ont toujours privilégié les garçons aux dépens des filles. En outre, le fossé en matière d'éducation disparaît une fois que les hommes sont sur le marché du travail, où, presque partout, ils gagnent plus d'argent et assument des postes plus importants que les femmes.

Cependant, les jeunes hommes pauvres qui quittent l'école avant l'âge de 16 ans risquent davantage d'être au chômage et inemployables ; pauvres ; d’être recrutés par des gangs et des groupes extrémistes ; d’être incarcérés ; de se livrer à de la violence domestique (et à la violence en général) ; avoir des opinions discriminatoires, racistes et sexistes ; faire des enfants hors mariage, etc. La liste des potentiels comportements antisociaux est longue et déprimante.

En résumé, les garçons qui abandonnent leurs études constituent un handicap économique. Ils sont un danger social et sécuritaire (nous en voyons tellement impliqués dans des conflits).

Une classe du premier cycle du secondaire dans les zones rurales du Guatemala où les filles sont bien plus nombreuses que les garçons (mai 2019)
Une classe du premier cycle du secondaire dans les zones rurales du Guatemala où les filles sont bien plus nombreuses que les garçons (mai 2019)

Pourquoi tant de garçons abandonnent-ils l'école ?

Dans de nombreux pays où le PME travaille, un nombre important de garçons abandonnent leurs études plus tôt en raison de la pauvreté et de contraintes professionnelles. Mais, l'école elle-même semble également mettre les garçons à l’écart. Si vous avez été enseignant, la plupart de vos problèmes de discipline ont probablement été causés par des garçons.

Dans presque toutes les classes du secondaire dans lesquelles j’ai été en Asie du Sud-Est, en Afrique du Nord et en Amérique centrale, j’ai souvent vu des enseignants se contenter de dispenser leurs cours en s’adressant uniquement aux filles et à quelques garçons seulement dans la classe, la plupart d’entre eux étant relégués au fond de la salle de classe où ils sont distraits par leurs camarades ou leurs téléphones.

Les adolescents que j’ai interrogé au Timor-Leste, à la Grenade, au Honduras, en Indonésie, au Maroc et au Liban, ont presque tous la même chose en substance : l’école est ennuyeuse. Elle ne sert à rien. Elle ne leur donnera pas de travail. Ils ne voient pas son intérêt. Leurs enseignants les détestent.

Comment résoudre le « problème des garçons » ?

La recherche offre de nombreuses solutions potentielles pour aider les garçons à réussir à l’école telles que :

  • reconnaître les différences biologiques entre les sexes et prendre en compte ces différences dans la conception et l’enseignement des programmes ;
  • se concentrer sur la correction – plutôt que la punition – de mauvaises conduites ;
  • recruter davantage d'enseignants de sexe masculin ;
  • prévoir plus d’activité ludiques ;
  • des écoles non mixtes ;
  • des programmes faisant le lien entre école travail ;
  • plus d'enseignement professionnel et technique (le défi consiste à faire participer les filles à ces programmes) ;
  • mettre fin aux classements des élèves par ordre de compétence ;
  • encourager les garçons à lire tout ce qu’ils peuvent et le plus souvent qu’ils le pourraient ;
  • faire prendre conscience aux enseignants de leurs propres préjugés et stéréotypes liés au genre et
  • avoir plus d'activités stimulant l’esprit de compétition dans les écoles (quelque chose qui, de ma propre expérience, a souvent galvanisé les garçons les plus récalcitrants).

Mais avant tout, il faut d'abord reconnaître qu'il y a un problème. Et nous devons éviter de faire de l'éducation un jeu à somme nulle. Aider les filles ne fait pas de mal aux garçons, et soutenir les garçons en difficulté ne doit pas nuire aux progrès continus des filles.

Pour exploiter pleinement le potentiel de l'éducation afin de faire progresser l'égalité des sexes, nous devons continuer de nous concentrer sur la scolarisation des filles et la création d'espaces sûrs pour les écoles. Cependant, nous devons également reconnaître qu’un véritable progrès en matière d’éducation, d’égalité réelle pour les filles, les femmes et les familles, les écoles et les sociétés stables et sûres dépendent également de la réussite de l'éducation des garçons.

Cet article s’inspire d’une conférence de l'auteur à l'Université du Lancashire central, à Preston en Angleterre, le 9 juillet 2019

Références

GEM Report (2018, June 15). Did you know? There are just as many boys out of school as girls  

GEM Report (2018, April). Don’t forget the boys

Kuper, S. & Jacobs, E. (2019). The untold danger of boys falling behind in school

OECD (2015). The ABC of Gender Equality in Education: Aptitude, Behaviour, Confidence

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