Lettre de solidarité conjointe à l'Union africaine : L'impact du COVID-19 sur l'éducation des filles et le mariage des enfants
Une élève de CP à l'école primaire Felege Abay de Bahar Dar, Ethiopie. Crédit : GPE/Kelley Lynch

La pandémie de COVID-19 pourrait avoir un effet dévastateur sur le continent africain. Elle aggravera les inégalités auxquelles font déjà face les populations vulnérables, en particulier les adolescentes. Girls Not Brides : le Partenariat mondial pour mettre fin au mariage d’enfants, Rozaria Memorial Trust, le Partenariat mondial pour l'éducation, Plan International et le Forum des éducatrices africaines (FAWE) sont solidaires de l'Union africaine pour garantir que la priorité donnée à l'accès des filles à l'éducation n'est pas interrompue et pour atténuer le risque d'une augmentation des mariages d’enfants et d'autres vulnérabilités.

La pandémie de COVID-19 est une urgence mondiale sans précédent, qui est susceptible d'avoir un effet dévastateur sur le continent africain si les tendances observées dans d'autres parties du monde prennent racine dans la région. La pandémie aggravera les inégalités déjà rencontrées par les populations vulnérables, en particulier les adolescentes.

Les mesures de contrôle de la propagation du virus - y compris la fermeture d’écoles, le travail à domicile, la distanciation physique et les restrictions de mouvement - auront des conséquences imprévues sur l’éducation des filles. Les enseignements de la crise d'Ebola montrent que la fermeture d'écoles peut entraîner une augmentation de la violence basée sur le genre, des grossesses chez les adolescentes, du mariage des enfants, de l'exploitation et d'autres formes d'abus contre les adolescentes. La fermeture d'écoles sera particulièrement dévastatrice pour les filles les plus vulnérables, telles que les réfugiées, les personnes déplacées (PDI), les rapatriées et les filles vivant avec un handicap.

Les pays connaissant l'extrême pauvreté, la vulnérabilité économique et les crises présentent les disparités les plus élevées entre les sexes dans le domaine de l'éducation. La fermeture d'écoles au Mali, au Niger et au Soudan du Sud - trois pays où les taux de scolarisation et d'achèvement des filles sont parmi les plus bas - ont contraint plus de quatre millions de filles à abandonner l'éducation. Cela pourrait augmenter le risque de mariage d'enfants, de grossesse chez les adolescentes, d'exploitation et de violence basée sur le genre.

La plupart des facteurs complexes qui motivent le mariage des enfants sont également exacerbés dans les situations d'urgence, car les structures familiales et communautaires s'effondrent pendant les crises. Une pandémie de cette nature présente des défis uniques qui nécessitent des mesures pour protéger les adolescentes contre la violence et l'exploitation, à la fois dans les phases de réponse et de rétablissement. Des interventions essentielles qui donnent la priorité aux plans d'éducation tenant compte des sexospécificités, ainsi que des incitations économiques et d'autres mesures de protection sociale, garantiront que les adolescentes ne sont pas laissées pour compte et qu'elles reçoivent l'éducation qu'elles méritent.

L'impact de COVID-19 sur les adolescentes est susceptible de dépasser celui causé par l'épidémie d'Ebola. Nous exprimons collectivement notre solidarité avec l'Union africaine et ses États membres dans la réponse au COVID-19. Nous reconnaissons et louons son leadership remarquable dans le cadre du programme «L’Afrique contre Ebola» qui a mobilisé les ressources et l’expertise nécessaires pour établir des mécanismes de riposte qui ont contenu l’épidémie.

En tant que partenaires multilatéraux et ONG travaillant sur l'éducation des filles et la fin du mariage des enfants, nous avons mis en place plusieurs mesures pour répondre à la crise COVID-19. Il s'agit notamment du financement pour une riposte rapide dédié au secteur de l'éducation au niveau des pays, de recommandations politiques et de l'assistance technique, ainsi que de la collecte et du partage d’évidences preuves et des bonnes pratiques. Les détails se trouvent à l'annexe 1.

En solidarité avec l'UA, nous avons mobilisé notre expertise collective pour partager les principes de bonnes pratiques suivants afin d'atténuer les impacts du COVID-19 sur l'éducation des filles et leurs vulnérabilités. Nous espérons que ces informations seront utiles à la Commission de l'UA dans ses efforts pour garantir que les filles de ses États membres restent éduquées, protégées et en sécurité pendant cette pandémie. Nous utiliserons également nos réseaux pour soutenir la diffusion et l'application de ces bonnes pratiques.

  • Inclure des approches sensibles au genre dans la riposte éducative au COVID-19. Veiller à ce que les mesures de riposte soient basées sur une analyse solide basée sur le genre et tiennent compte des normes sociales et culturelles sexospécifiques nuisibles qui influencent la vulnérabilité des filles et des garçons à l’infection, à l’exposition et au traitement. Cela implique de veiller à ce que les filles et les femmes soient au cœur de la riposte et de créer des mécanismes qui contrôlent la réinsertion des filles dans les écoles.
  • Impliquer les filles et les femmes dans la riposte. Consulter les filles et les jeunes femmes pendant tout le cycle de la riposte, de l'évaluation des besoins, à la conception de l'éducation et autres interventions, jusqu'au suivi de l'efficacité de la riposte. Cela inclut tout impact involontaire sur les filles et les jeunes femmes en raison de la fermeture d'écoles. Les filles devraient être impliquées dans les décisions concernant leur éducation.
  • Travailler avec les enseignants et les communautés. Lorsque les écoles sont fermées, les gouvernements devraient soutenir les enseignants, le personnel scolaire et les communautés pour garantir l'adoption de méthodes inclusives d'enseignement à distance. La sensibilisation de la communauté à l’éducation des filles devrait continuer de protéger les acquis scolaires des filles et des garçons et de soutenir les enseignants.
  • Adopter des solutions d'apprentissage à distance appropriées. Investir dans des méthodes d'enseignement à distance appropriées à faible technologie, abordables et sensibles au genre, telles que les émissions de radio, pour soutenir l'apprentissage continu. Veiller à ce que des mesures de sécurité en ligne soient en place pour protéger les filles contre le harcèlement et les prédateurs.
  • Veiller à ce que les adolescentes et les garçons continuent d'avoir accès à une éducation sexuelle complète et adaptée à l'âge et à des informations et des services en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs dans le cadre de l'enseignement à distance.
  • Former les éducateurs à reconnaître et à prévenir la violence. Élaborer des lignes directrices pour soutenir et former les éducateurs à reconnaître et à prévenir la violence à l'égard des filles et le risque de mariage d'enfants et à assurer la continuité des pratiques d'orientation et de protection, en particulier au niveau communautaire.
  • Maintenir les services essentiels pour les filles et les garçons les plus vulnérables. Celles-ci comprennent des services de collecte de repas scolaires ou des transferts monétaires pour remplacer les repas scolaires et l'accès des filles aux produits d'hygiène menstruelle. Cela pourrait aider à empêcher les filles provenant des ménages les plus pauvres de recourir à un travail rémunéré et risqué pour compléter les revenus familiaux.
  • Encouragez les filles à se réinscrire. Les parties prenantes au niveau du gouvernement et de l'école devraient identifier les politiques qui encouragent les filles à se réinscrire une fois la pandémie passée. Cela comprend la suppression des politiques discriminatoires à l'égard des filles, notamment l'interdiction de réintégrer les filles enceintes et les jeunes mères, et la fourniture d'un soutien par le biais d'opportunités d'apprentissage flexibles et accélérées, ainsi que des cours de rattrapage. Supprimer les frais de scolarité et autres coûts indirects qui pourraient empêcher les filles de retourner à l'école.
  • Protéger les dépenses du secteur social. Les ministères du gouvernement (Éducation, Santé et Finances) devraient travailler ensemble pour s'assurer que le financement intérieur n'est pas affecté négativement par la pandémie. Ils devraient tenir compte de la dimension de genre dans la planification et la budgétisation sectorielles pour améliorer la capacité des gouvernements à cibler les fonds pour un impact maximal et tenir compte des effets disproportionnés du COVID-19 sur les filles.
  • Élaborer un plan complet post COVID-19 pour la réouverture des écoles. Les ministères de la santé et de l'éducation devraient travailler ensemble pour élaborer et communiquer des délais bien définis pour la réouverture des écoles, avec des critères et des normes clairs. Impulser la réforme pour réorienter et transformer les systèmes éducatifs, en s'attaquant aux principaux goulots d'étranglement et obstacles à l'éducation des filles. Cela implique une action concertée pour favoriser la prochaine génération de talents féminins qualifiés et de leadership - les médecins, les infirmières, les scientifiques, les technologues et les enseignants nécessaires pour lutter contre la prochaine pandémie.

Nos organisations respectives s’engagent à travailler avec l'UA pour relever les défis de cette pandémie. Nous comptons sur vous pour votre leadership habituel.

Signataires

Dr. Nyaradzayi Gumbonzvanda, Ambassadeur de bonne volonté de l'UA pour mettre fin au mariage des enfants et fondatrice et Directrice Exécutive de Rozaria Memorial Trust

Dr. Faith Mwangi-Powell, Directrice Exécutive de Filles Pas Epouses, le Partenariat mondial pour mettre fin au mariage des enfants

Alice Albright, Directrice générale du Partenariat mondial pour l'éducation

Anne-Birgitte Albrectsen, Directrice Exécutive de Plan International

Martha Muhwezi, Directrice Exécutive du Forum des Educatrices Africaines (FAWE)

Télécharger la lettre conjointe

Une élève de CP à l'école primaire Felege Abay de Bahar Dar, Ethiopie. Crédit : GPE/Kelley Lynch

Dernières actualités