Accélérer les progrès vers l'égalité de genres : entretien avec le Directeur général du GPE

Charles North, Directeur général par intérim du Partenariat mondial pour l’éducation donne son avis sur les actions concrètes que nous pouvons entreprendre pour parvenir à l'égalité des genres dans et par l'éducation.

13 avril 2022 par Secrétariat du GPE
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Lecture : 4 minutes
Une élève attentive pendant une leçon à l’école d’Hidassie à Addis-Abeba en Éthiopie. Crédit : GPE/Midastouch
Une élève attentive pendant une leçon à l’école d’Hidassie à Addis-Abeba en Éthiopie.
Credit: GPE/Midastouch

1. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les principaux obstacles à l'égalité des genres dans le cadre de votre travail ?

Charles North (CN) : Tout d'abord, le GPE s'est engagé en faveur de l'égalité des genres pour garantir que toutes les filles et tous les garçons bénéficient de chances égales en matière d'éducation.

On estime que 129 millions de filles à travers le monde ne sont pas scolarisées du fait des longues distances qu’elles doivent parcourir pour se rendre à l'école, des normes et pratiques culturelles, des violences basées sur le genre en milieu scolaire et des mariages précoces ou forcés.

Garçons et filles sont tous confrontés à des obstacles pour obtenir une bonne éducation dans les zones touchées par les conflits et dans les ménages qui dépendent de leur travail ou de leurs revenus. Cependant, comme nous le savons, les obstacles à l'égalité des genres sont multiformes et vont bien au-delà des inégalités scolaires.

Dans chaque pays, les femmes sont confrontées à diverses formes d'inégalités entre les genres, allant des disparités salariales aux difficultés d'accès aux capitaux par exemple. Ces facteurs sont également aggravés par les normes culturelles et les stéréotypes qui freinent les femmes à l’échelle globale.

Selon ONU Femmes, « seuls 67 pays ont des lois contre les discriminations liées au genre dans les pratiques d'embauche » et « dans 18 pays, les maris peuvent légalement empêcher leurs femmes de travailler. »

Ces obstacles n'existent pas seulement dans les pays à faible revenu. Par exemple, selon le rapport Women's Leadership Gap du Center for American Progress : « Bien qu'elles occupent près de 52 % de tous les postes de direction et de cadres, aux États-Unis, les femmes accusent un retard considérable par rapport aux hommes en termes de représentation aux postes de direction. »

2. Pour vous, quel changement de politique est nécessaire pour accélérer les progrès vers l'égalité des genres dans l'éducation à l'échelle mondiale ?

CN : Eh bien, puisqu'il existe différents types d'obstacles, il faut des changements de politique ciblés. Un changement général de politique ne suffirait pas. Par exemple, en termes de scolarisation égale pour les filles et les garçons, je pense que les politiques qui réduisent le temps de trajet et la distance entre le domicile et l'école supprimeraient un obstacle majeur à la fréquentation scolaire.

Des politiques sont également nécessaires pour apporter une solution face aux normes et pratiques culturelles concernant la scolarisation des filles, les violences basées sur le genre en milieu scolaire et les mariages précoces ou forcés. Des changements politiques progressifs dans ces domaines peuvent jouer un rôle catalyseur dans l'accélération des progrès vers l'égalité des genres.

Toutefois, comme je l'ai mentionné plus tôt, l'égalité des genres va au-delà de l'égalité d'accès à l'école. Par conséquent, les changements politiques doivent également s'attaquer à d'autres domaines, dont celui des disparités salariales par exemple.

Des changements majeurs dans les politiques de rémunération dans les secteurs public et privé pourraient avoir un impact significatif. Il en va de même pour l'accès au capital, les droits fonciers et l'accès à la justice.

3. Comment le GPE contribue-t-il à une meilleure prise en compte de l'égalité des genres dans les pays partenaires ?

CN : Le GPE mobilise ses partenaires pour placer l'égalité des genres au cœur des systèmes éducatifs nationaux, pour que toutes les filles et tous les garçons aient la chance d'apprendre et de s'épanouir. Nous utilisons une variété d'approches pour soutenir et attirer l'attention sur l’importance du respect de l'égalité des genres.

Nous soutenons les investissements des pays dans des systèmes et des plans d'éducation équitables et sensibles au genre, afin d'améliorer les résultats en matière d'accès, de rétention et d'apprentissage pour toutes les filles et tous les garçons.

Le GPE octroie par exemple des financements pour soutenir la mise en œuvre de plans d'éducation qui favorisent l'égalité des genres.

À ce jour, le GPE a investi plus de 1,5 milliard de dollars en complément des investissements nationaux destinés à soutenir l'égalité des genres. Il s'agit notamment de financements de stratégies d’éducation sensibles au genre, de campagnes de sensibilisation, de formations communautaires sur le genre, de recrutement d'enseignantes et de construction de toilettes séparées, entre autres.

Le GPE utilise également son modèle de partenariat basé sur les résultats pour travailler avec les pays à faible revenu pour donner la priorité à la planification et aux dépenses pour soutenir l'éducation des filles tout au long du cycle de scolarisation, en vue d'atteindre l'égalité des genres. Fin 2020, le GPE a créé l'Accélérateur de l'éducation des filles, un fonds de 250 millions de dollars destiné à soutenir les possibilités de scolarisation et d’apprentissage des filles.

Pour en savoir plus sur la manière dont l'égalité des genres est intégrée dans la stratégie du GPE, cliquez ici.

4. Si vous pouviez demander quelque chose aux partenaires de l'éducation pour stimuler les progrès en matière d'égalité des genres, que serait-ce ?

CN : Le principal point sur ma liste serait de « ancrer » l'égalité des genres dans la planification et la prise de décision. Cela nécessite un engagement à lutter contre les inégalités et à avoir accès à des données de haute qualité susceptibles de mettre à nu les disparités.

Les partenaires doivent approfondir les données et la dynamique communautaire pour identifier et comprendre les causes profondes de cette inégalité. Ce n'est qu'alors qu'ils pourront commencer à formuler une intervention qui peut avoir un impact à grande échelle dans la lutte contre les inégalités entre les genres.

Au Salvador, par exemple, l'engagement du gouvernement à lutter contre les inégalités en adoptant l’approche recommandée par le GPE 2025 a mené à l'inclusion de l'unité en charge de l'égalité des genres du ministère de l'Éducation dans les instances de dialogue politique où les priorités ont été fixées pour la mise en œuvre du financement du GPE.

En veillant à ce que les bonnes personnes soient présentes dans la salle lors des discussions, le pays a pu intégrer l'égalité des genres dans l'enseignement de base, sa réforme prioritaire.

En République démocratique du Congo, les partenaires de développement engagés dans le processus du GPE 2025 ont réalisé qu'un ensemble complexe de défis rendait difficile la priorisation d'un domaine de réforme qui entraînerait une transformation du système. Un participant a décrit ce qui s'est passé comme suit :

« Il m'a d'abord semblé que l'égalité des genres n'était qu'un aspect de l'accès. Au fil de l'évolution des travaux, cette perspective a changé et a fait naître la nécessité d'en faire un axe structurant, non pas parce qu'elle était obligatoire mais parce qu'elle était essentielle dans le cadre de la stratégie pour assurer l'équité et la qualité de l'éducation. Cela a également permis d'appréhender le problème dans une approche holistique. »

Les discussions entamées suite à l'adoption par le pays du nouveau modèle du GPE ont amené les partenaires à convenir que l'insuffisance des données et de la coordination a entravé les progrès de la stratégie d'éducation des filles à l'échelle du pays.

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