Comment la Côte d’Ivoire veut transformer son système éducatif
30 octobre 2023 par Biney Jonh Francis, Ministry of Education, Côte d'Ivoire, Ludovic Signarbieux, GPE Secretariat, et Christophe Deconinck, GPE Secretariat |
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En Côte d’Ivoire, la communauté éducative nationale et les partenaires de développement travaillent ensemble pour améliorer la qualité de l’éducation et définir les bases d’un nouveau contrat social pour transformer le système éducatif ivoirien.

 

La publication en 2021 des résultats du Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN 2019 (PASEC) a fait effet d’un électrochoc en Côte d’Ivoire. Selon le rapport, seulement 41 % des élèves de sixième année du primaire étaient au-dessus du seuil suffisant en lecture et seulement 17 % avaient des compétences suffisantes en mathématiques.

Malgré les investissements importants du pays dans son système éducatif, il fallait se rendre à l’évidence que la majorité des filles et des garçons ivoiriens n’acquéraient pas les compétences de base pouvant leur ouvrir les portes d’un avenir meilleur.

Consultations à grande échelle pour identifier causes et remèdes

Les autorités éducatives ont rapidement réagi et organisé les États généraux de l'éducation nationale et de l'alphabétisation (EGENA) au cours de l’année 2022. Ces rencontres nationales multiples, approfondies et inclusives ont permis à la communauté éducative nationale et aux partenaires de développement d’identifier et d’analyser les principales sources du problème et de formuler des recommandations.

L’objectif était de proposer des solutions pour améliorer la qualité de l’éducation et définir les bases d’un nouveau contrat social pour transformer le système éducatif ivoirien.

Les EGENA ont identifié 42 réformes à mettre en œuvre au cours des 10 prochaines années.

Le processus participatif des états généraux a constitué une base solide sur laquelle le pays et ses partenaires ont pu se reposer pour définir un pacte de partenariat.

Choisir une réforme prioritaire

Le but du pacte de partenariat est de resserrer encore plus la vision du pays sur une réforme prioritaire susceptible de catalyser un changement transformateur du système éducatif. La Côte d’Ivoire a pour ambition que tous les élèves terminant le cycle primaire sachent lire, écrire et calculer d’ici à 2030.

Pour atteindre cet objectif, le pays a choisi comme réforme prioritaire d’améliorer les apprentissages fondamentaux en vue de transformer durablement l’éducation de base.

Des élèves en classe à l’école maternelle communautaire de Nambirghékaha, près de Korhogo, Côte d’Ivoire. Crédit : GPE/Rodrig Mbock
Des élèves en classe à l’école maternelle communautaire de Nambirghékaha, près de Korhogo, Côte d’Ivoire.
Credit:
GPE/Rodrig Mbock

Définir les axes d’action et promouvoir l’égalité de genre

Pour améliorer l’apprentissage fondamental, le pacte repose sur la mise en œuvre du Programme National des Premiers Apprentissages (PNAPAS).

Ce programme, qui commencera en 2023/24, utilise une approche basée sur les sciences cognitives et la neuropsychologie pour comprendre comment les enfants apprennent à lire dans les premières années d’école. Il prévoit notamment l’ouverture systématique d’une classe de préprimaire dans les écoles primaires, pour préparer les enfants dès le plus jeune âge aux apprentissages.

La Côte d’Ivoire a déjà piloté avec succès ces approches dans six régions défavorisées du pays avec le soutien du GPE et de la Banque mondiale dans le cadre du PAPSE (Projet d’amélioration de la prestation des services éducatifs).

Le pacte vise aussi à réduire les barrières liées au genre et à promouvoir un accès équitable à tous les enfants.

Pour réduire les disparités et les stéréotypes au sein du système éducatif, le pacte propose des mesures telles que la formation des enseignants, une féminisation du corps enseignant et du leadership scolaire, la révision des curricula et des textes, la promotion de la sureté dans les écoles et la prévention des formes de violence.

Pour analyser les causes sous-jacentes qui freinent la transformation du système, le pacte prévoit de réaliser des études dans les domaines où les données probantes sont limitées. Par exemple pour le renforcement de la gestion des ressources humaines, le pacte prévoit une étude pour examiner les différentes formes de déperdition et leur causes sous-jacentes.

Pour ce faire, le pacte prévoit une étude exploratoire pour analyser les barrières que rencontrent les femmes dans les rôles d’enseignante et de directrices d’école pour mieux affiner les interventions et les mécanismes visant à une plus grande féminisation de la profession.

Le début de la transformation

Au cours des derniers mois, la Côte d’Ivoire a franchi des étapes cruciales, d’analyse, de recherche de consensus et d’accord sur ses objectifs prioritaires pour le secteur éducatif.

Le pays dispose désormais d’une précieuses feuille de route permettant d’aligner et d’harmoniser non seulement les multiples intervenants nationaux mais aussi les acteurs externes pour plus de synergie et d’impact.

Le GPE continuera à soutenir une éducation de qualité pour toutes les filles et tous les garçons en Côte d’Ivoire, notamment par ses financements, en alignement total avec les choix de réforme du pays.

Francis Biney
Francis Biney
Inspecteur général, Ministère de l’Éducation nationale, Côte d’Ivoire

« En prenant compte non seulement des compétences techniques imparties par l’éducation, mais aussi des valeurs éthiques telles que le respect de l’autre, du genre, la protection de l’environnement, et toutes les compétences nécessaires pour le 21e siècle, le système éducatif peut transformer durablement la société. »

Sabina Vigani
Sabina Vigani
Directeur pour la Côte d’Ivoire, Fondation Jacobs, agence de coordination en Côte d’Ivoire

« Transformer l’éducation, c’est trouver des leviers de changement systémique pour appuyer le pays partenaire, en s’éloignant de la mentalité de projets. »

Yves Jantzem
Yves Jantzem
Responsable senior des opérations, Banque mondiale Côte d’Ivoire

« Transformer l’éducation, c’est renforcer les capacités du gouvernement pour mettre à l’échelle les actions qui permettront d’améliorer l’éducation, du primaire jusqu’à l’enseignement supérieur en passant par l’enseignement technique et la formation professionnelle, pour améliorer l’employabilité des bénéficiaires. Transformer l’éducation c’est faire en sorte que le système éducatif puisse s’adapter aux défis futurs. »

Mame Omar Diop
Mame Omar Diop
Représentant résident par intérim, UNESCO Côte d’Ivoire

« Transformer l’éducation en Côte d’Ivoire, c’est réaliser un changement de paradigme : ce n’est plus seulement agir dans les salles de classe, mais aussi faire l’éducation à distance, et obtenir de meilleurs résultats d’apprentissage. »

Céline Gratadour
Céline Gradatour
Chef de projet éducation et formation professionnelle, Agence française de développement

« Transformer le système éducatif, c’est regarder la performance du secteur dans son ensemble, du primaire jusqu’au secondaire, parce que l’enjeu est de faire des enfants qui quittent l’école des citoyens. »

Ali Coulibaly
Ali Coulibaly
Spécialiste en éducation, Banque mondiale Côte d’Ivoire

« Transformer l’éducation, c’est s’assurer que tous les partenaires travaillent ensemble et aident le gouvernement à fournir un enseignement de qualité aux enfants, leur donnant l’espoir d’une vie meilleure. »

Maiga Seydou
Maiga Seydou
Responsable suivi et évaluation du PAPSE

« Transformer l'éducation en Côte d’Ivoire c'est agir pour que les enfants apprennent vraiment et les maintenir à l'école le plus longtemps possible, car c’est avec une population éduquée qu’on pourra transformer l’économie dans son ensemble. »

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