S'adapter et apprendre : leçons tirées des programmes de riposte à la COVID-19 pour rendre l'éducation plus résiliente aux crises futures

Le GPE a réuni les partenaires pour discuter des enseignements tirés de la pandémie et de la manière dont ils peuvent aider à mieux préparés les systèmes éducatifs et mieux répondre aux crises futures.

02 mai 2024 par Anna-Maria Tammi, GPE Secretariat, Evans Atis, GPE Secretariat, et Ramya Vivekanandan, GPE Secretariat
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Lecture : 6 minutes
Des élèves de deuxième année de l'école primaire Arapaima à Lethem dans la région 9 au Guyana. Crédit : GPE/Kelley Lynch
Des élèves de deuxième année de l'école primaire Arapaima à Lethem dans la région 9 au Guyana.
Credit: GPE/Kelley Lynch

La pandémie de COVID-19 a déclenché une situation d'urgence sans précédent dans le domaine de l'éducation. Très rapidement après le début de la pandémie, les écoles ont été fermées et le sont restées pendant des semaines, des mois, voire des années dans certains cas. Au plus fort de la fermeture des écoles, l'éducation de 1,6 milliard d'enfants étaient affectée.

Les données ne permettent pas encore de déterminer si la fermeture des écoles a contribué à limiter la transmission du virus. Il existe cependant de nombreuses preuves des effets néfastes des fermetures prolongées des écoles sur l'apprentissage et le bien-être des enfants (comme le montre cette étude par exemple).

Les conflits, les épidémies, les catastrophes et le changement climatique perturbent souvent les systèmes éducatifs. Alors que les gouvernements réfléchissent à la manière de réagir à ces perturbations, beaucoup reste à apprendre de la pandémie de COVID-19.

Le mois dernier, le GPE a organisé un événement pour faire le point avec un ensemble diversifiés de partenaires sur ce que nous avons appris au cours des quatre dernières années afin de maintenir la continuité pédagogique pour tous les enfants en période de difficultés et d'incertitude.

L'événement s'est également appuyé sur les résultats de l'évaluation du portefeuille de 500 millions de dollars octroyé par le GPE aux pays partenaires pour soutenir leurs plans de riposte à la pandémie (En savoir plus sur ce soutien et consulter les exemples au niveau des pays).

Nous partageons ici les principales réflexions de l'événement concernant la manière dont ces enseignements peuvent inspirer nos efforts collectifs à l'avenir :

Atteindre en priorité les plus marginalisés

Les pertes d'apprentissage ont été plus importantes pour les enfants marginalisés, notamment les enfants issus de familles à faibles revenus, les enfants en situation de handicap et les filles. Les interventions accessibles à un petit nombre seulement ont aggravé les inégalités préexistantes, les jeunes enfants n'ayant souvent aucune possibilité d'éducation à distance.

Lors de l'élaboration de stratégies d'enseignement à distance, il est essentiel d'envisager en premier lieu l'accès des enfants les plus marginalisés et d'accorder une attention particulière aux plus jeunes.

Au Rwanda, les familles vulnérables qui ne pouvaient pas bénéficier de l'enseignement à distance ont reçu des téléphones portables et des radios à énergie solaire.

« Des SMS étaient envoyés sur le téléphone des parents pour les encourager à accompagner leurs enfants dans leur apprentissage à la maison. Le but était de faire en sorte que les élèves puissent continuer à apprendre, même après les heures de télévision et de radio, à leur propre rythme. »

Charles Karakye
Secrétaire permanent, ministère de l'Éducation du Rwanda

Pour les enfants en situation de handicap, il était primordial d'impliquer les parents et les aidants dans la conception des stratégies d'apprentissage à distance. Des interactions positives et continues avec ceux-ci ont aidé les enfants en situation de handicap à acquérir des compétences socio-émotionnelles, composantes essentielles d'une éducation de qualité.

Les projets communautaires ont également amélioré l'accès à l'éducation pour les filles, en se concentrant sur celles qui risquent le plus d'abandonner l'école.

L’alimentation scolaire était une composante essentielle pour garantir un accès continu à l'apprentissage aux enfants, en particulier les enfants vulnérables tels que ceux qui vivent dans les zones rurales.

Les fermetures d’écoles ont démontré que les écoles jouent un rôle essentiel au-delà de l'éducation, notamment en ce qui concerne la fourniture de services scolaires tels que la santé et l'alimentation.

« Les cantines scolaires […] ont été vraiment une très bonne expertise parce que pendant le COVID, dans les zones rurales, nous avons maintenu les cantines ouvertes parce qu’il y avait aussi des problèmes d’alimentation chez les enfants. »

Chehem Kalaf
Ministère de l'Éducation, Djibouti

La technologie n'est pas toujours à la hauteur

L'enseignement à distance est devenu une nécessité pour assurer la continuité pédagogique pendant les fermetures d'écoles. Quel que soit le nom qu'on lui donne, l'éducation à distance est désormais incontournable, offrant la possibilité d'apprendre à la fois en temps de crise et en temps normal.

Albert Nsengiyumva, secrétaire exécutif de l'Association pour le développement de l'éducation en Afrique, a souligné que les téléphones portables étaient une modalité sous-exploitée pour l'apprentissage pendant la pandémie.

L'enseignement à distance peut favoriser l'apprentissage s'il s'adapte aux changements, au contexte et aux besoins des élèves. Cependant, les solutions d'enseignement à distance doivent être multimodales, et leur conception doit faire preuve d’une compréhension approfondie et une planification de la manière dont les différents modes d'apprentissage interagissent les uns avec les autres.

Il est à noter que les solutions technologiques utilisées pour l'enseignement à distance sont rarement les meilleures.

Le Bangladesh a mis en place un programme d'apprentissage accéléré. Les supports papier constituaient le principal mode d'apprentissage, accompagné de contrôles périodiques par le biais de téléphones portables afin de suivre l'apprentissage et le bien-être socio-émotionnel des élèves.

Des enfants comme Kevin, 11 ans, écoutaient des cours à la radio chez eux alors que leurs écoles étaient fermées durant la pandémie de COVID-19. Crédit : UNICEF/Kanobana
Des enfants comme Kevin, 11 ans, écoutaient des cours à la radio chez eux alors que leurs écoles étaient fermées durant la pandémie de COVID-19.
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UNICEF/Kanobana

Les enseignants doivent être inclus dans le dialogue sur le secteur de l'éducation

Quelle que soit la technologie, les enseignants sont toujours au centre de l'éducation. La résilience des enseignants pendant la pandémie a été saluée, soulignant les innovations qu'ils ont développées pour leurs élèves avec peu ou pas de soutien et rendant hommage aux innombrables enseignants qui, en tant que travailleurs de première ligne, sont décédés après avoir contracté la COVID-19.

Si l'accès aux infrastructures éducatives, à la connectivité et au contenu était nécessaire durant la pandémie, cela ne servait à rien si l'on ne s'assurait pas que les enseignants avaient la capacité et les compétences nécessaires pour les utiliser, s'adapter et jouer un rôle de premier plan.

Sisera Simon, responsable de la division humaine et sociale de l'Organisation des États de la Caraïbe Orientale (OECO), a expliqué comment les enseignants des pays de l'OECO se sont positionnés en tant que leaders et ont innové avant même que des interventions ne soient mises en place, utilisant Zoom et WhatsApp pour communiquer avec les élèves, les parents et les aidants. Le gouvernement a ensuite utilisé ces connaissances pour créer des programmes d'enseignement à distance que les enseignants pouvaient mettre en œuvre.

La résilience des enseignants est un élément sur lequel il faut s'appuyer à l'avenir. Le leadership dont les enseignants ont fait preuve durant la pandémie met encore plus en avant le fait que leur voix doit être entendue.

Il est évident que les enseignants doivent être protégés et inclus comme partenaires essentiels dans le dialogue sur l'éducation.

Des enseignants formés à l'utilisation de Khang Panya Lao, une plateforme d'enseignement et d'apprentissage en ligne développée avec le soutien du GPE, en RDP lao. Crédit : UNICEF Laos/2021/KSaypaseuth
Des enseignants formés à l'utilisation de Khang Panya Lao, une plateforme d'enseignement et d'apprentissage en ligne développée avec le soutien du GPE, en RDP lao.
Credit:
UNICEF Laos/2021/KSaypaseuth

Se préparer à adapter les programmes

Tout au long de la pandémie, le secteur de l'éducation a dû s'adapter à un contexte et à une politique sanitaires en constante évolution, ainsi qu'à l'évolution des données concernant les approches efficaces de la continuité pédagogique et du bien-être des élèves.

En Somalie, le secteur de l'éducation avait de l'expérience en ce qui concerne l’adaptation des programmes en raison des précédentes périodes de conflit et d'instabilité.

Durant la planification des programmes de riposte à la COVID-19, les partenaires ont gardé à l’esprit qu'il fallait rester simple, être souple et prévoir qu’il faudra s’adapter constamment en fonction de l’évolution de la crise sanitaire. Par exemple, le plan de riposte à la pandémie de COVID-19 a consisté à passer rapidement des documents imprimés, à des leçons radiophoniques préenregistrées, puis à des contrôles par le biais de téléphones portables pour que les enfants continuent d'apprendre.

En Gambie, l'un des facteurs qui a permis de mettre en place un programme adaptatif a été l'utilisation d'enquêtes téléphoniques multisectorielles très régulières. Ainsi, des données en temps réel sur l'apprentissage et l'accès ont pu être recueillies afin d'alimenter les stratégies d’enseignement à distance.

Les mesures de sécurité et d'hygiène sont devenues une pratique quotidienne dans les écoles au Cambodge. Crédit : UNICEF/2021/Sum Viyoura
Les mesures de sécurité et d'hygiène sont devenues une pratique quotidienne dans les écoles au Cambodge. Des élèves remplissent leurs bouteilles en lisant des rappels au point d'eau d'une école de la province de Siem Reap.
Credit:
UNICEF/2021/Sum Viyoura

Tirer des leçons du passé pour penser l’avenir

Si l'on regarde les quatre dernières années, il apparaît comme une évidence que travailler sur une seule partie du système pour garantir la résilience ne suffit pas.

La planification des réponses doit être associée à un financement, la technologie à des enseignants capables de l'utiliser, et le matériel d'apprentissage aux besoins spécifiques des enfants.

Des relations solides (entre les enfants et les enseignants ; entre les enseignants et leurs structures de soutien ; entre les administrateurs au niveau central et ceux qui sont plus proches des communautés, et les différents ministères concernés par la prise en charge des enfants) permettent aux systèmes éducatifs d'atténuer le plus gros des impacts des crises sur les enfants et, dans l'idéal, de veiller à la continuité pédagogique.

La résilience commence en temps « normal », à partir des liens qui sont renforcés entre les différents acteurs du système.

Nous devons reconnaître l'importance de la création de partenariats intersectoriels, y compris entre le secteur public et le secteur privé. Par exemple, les gouvernements de toute l'Afrique subsaharienne s'associent aux fournisseurs de téléphonie mobile pour élargir l'accès à l'éducation.

La planification en cas de crise et les plans de contingence sont également essentiels pour se préparer et réagir rapidement à différentes perturbations. Ces plans sont l'occasion d'institutionnaliser les leçons tirées de la pandémie qui peuvent être appliquées à d'autres crises, afin de déterminer ce qui est à refaire et ce qui ne l'est pas.

La planification en cas de crise et les plans de contingence sont également essentiels pour se préparer et réagir rapidement à différentes perturbations. Ces plans sont l'occasion d'institutionnaliser les leçons tirées de la pandémie qui peuvent être appliquées à d'autres crises, afin de déterminer ce qui est à refaire et ce qui ne l'est pas.

Enfin, la planification ne serait pas possible sans données probantes. Nous avons beaucoup à tirer de la réponse à la pandémie, notamment en ce qui concerne l'importance de concevoir des interventions pour atteindre en premier lieu les personnes les plus marginalisées.

Les données locales et la recherche appliquée continueront de jouer un rôle important dans la promotion de la résilience et d'une culture de prise de décision fondée sur des données probantes, afin que tous les enfants continuent à apprendre pendant les crises à venir.

Voir les enregistrements de l'événement.

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